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riche fonds en de meilleures mains ; M. de Fouchy ne nous donna que des réflexions triviales, une érudition puérile, des applications ridicules ; il répondit parfaitement à l’idée du public. M. de Mairan, le premier de nos physiciens, annonça une nouvelle édition de son Traité sur la glace ; il saisit cette occasion pour combattre le dégoût injuste qu’on a aujourd’hui pour les systèmes. Il avoua que le goût du système entraînait bien souvent dans des erreurs, mais il prouva fort bien que l’envie d’en soutenir rendait l’esprit capable de beaucoup d’efforts qu’il ne saurait faire sans cela. Cet illustre académicien fut fort applaudi du public, et très-peu de sa compagnie qui est toute newtonnienne. M. de Mairan et M. de Fontenelle sont les seuls de cette Académie qui n’aient pas abandonné les intérêts de Descartes. M. de Cassini rendit compte des peines qu’il s’est données, par ordre du roi, pour perfectionner la carte de Flandre. Il dit sans esprit beaucoup de choses communes sur le besoin qu’ont les généraux de cartes exactes où se trouvent marqués avec précision les ruisseaux, les ravins, les bois.

M. Le Monnier détailla ses dernières observations sur la dernière éclipse de la lune ; il a fait le voyage d’Écosse parce que l’éclipse devait y être tout entière. Ce jeune homme porte dans ses études une sorte d’enthousiasme qui fait espérer qu’il réussira. M. le marquis de Courtivron parla de la maladie qui a fait périr plus de la moitié de nos bêtes à cornes. Nos troupes, à leur retour en Bavière, portèrent ce fléau qui nous afflige encore aujourd’hui, mais moins vivement qu’il n’a fait. Nos médecins sont partagés sur la nature de cette maladie ; les uns prétendent que c’est une espèce de petite vérole, les autres que c’est un mal contagieux. Les expériences qu’a faites M. de Courtivron appuient la dernière opinion.

— L’Académie des inscriptions et belles-lettres fit sa rentrée le 12 du mois ; elle ne fut pas brillante. L’abbé Sallier, bibliothécaire du roi, y annonça le manuscrit original de la vie de saint Louis, par Joinville, qu’on vient de déterrer. Joinville était un homme de qualité qui accompagna le saint roi dans toutes ses expéditions d’outre-mer et qui n’a écrit que ce qu’il a vu. Son ouvrage est écrit avec une naïveté et un bon sens que nous ne trouvons dans aucun de nos anciens historiens. Ce monument, si précieux à la nation, avait été extrêmement