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MADAME DE LA FAYETTE.

Mme  de La Fayette, âgée de vingt-neuf ans, disait : « Je compte encore par vingt. »

« J’ai ouï raconter par Mme  de La Fayette, disait l’abbé de Saint-Pierre que, dans une conversation, Racine soutenait qu’un bon poëte pouvait faire excuser les grands crimes et même inspirer de la passion pour les criminels. Il ajouta qu’il ne fallait que de la fécondité, de la justesse, de la délicatesse d’esprit, pour diminuer tellement l’horreur des crimes de Médée ou de Phèdre qu’on les rendait aimables au spectateur au point de lui inspirer de la pitié pour leurs malheurs. Comme les assistants lui nièrent que cela fût possible, et qu’on voulut même le tourner en ridicule pour une opinion si extraordinaire, le dépit qu’il eut le fit résoudre à entreprendre Phèdre où il réussit si bien à faire plaindre ses malheurs que le spectateur a plus de joie de la criminelle que du vertueux Hippolyte. »

Mme  de La Fayette disait : « On a fait faire pour les demoiselles de Saint-Cyr une comédie, par Racine, le meilleur poëte du temps, que l’on a tiré de la poésie où il était inimitable pour en faire, à son malheur et à ceux qui ont le goût du théâtre, un historien très-imitable. »


XXVII

Comme les premières nouvelles de la paix n’ont pas été reçues en France aussi favorablement qu’il était naturel, un satirique dont on ignore le nom a fait l’épigramme suivante :


Louis, dit-on, est fort surpris,
En donnant la paix à la France,
De voir le peuple de Paris
Témoigner tant d’indifférence.
Pour rendre le calme aux esprits