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ce style vif, léger et inconséquent, qui caractérise tous ses écrits.

Le troisième livre est destiné à peindre l’abbé de Choisy comme écrivain. Malgré les éloges que l’auteur lui donne, la plupart de ses ouvrages sont assez peu lus. C’est un écrivain badin, superficiel, peu exact, point de logique, sans ordre. Ses Mémoires de Louis XIV[1] sont ce qu’il a fait de mieux, parce qu’on lui pardonne un certain désordre qui ne serait pas souffert ailleurs. L’abbé de Choisy avait une mère de beaucoup d’esprit. Elle lui recommandait de ne voir que des gens de qualité pour n’être point glorieux. « Allez passer l’après-dîner, lui disait-elle, avec les MM. de Lesdiguières, de Villeroy, de Guiche, de Louvigny. Vous vous accoutumerez à la complaisance de bonne heure, et il vous en restera toute votre vie un air de civilité qui vous fera aimer de tout le monde. » L’abbé de Choisy dit quelque part : « Pendant que je travaillais à l’histoire de Charles VI. M.  le duc de Bourgogne, à peine sorti de l’enfance, me dit : « Comment vous y prendrez-vous pour dire que ce roi était fou ? — Monseigneur, lui répondis-je sans hésiter, je dirai qu’il était fou ; la seule vertu distingue les hommes dès qu’ils sont morts. »

— Voici des vers que l’illustre et vieux M.  de Fontenelle a adressés à un jeune auteur qui lui avait demandé des conseils :


Il fauDans la vie où tu veux courir,
Il fauSonge bien ce que tu hasardes :
ïl faut avec courage également offrir
Et ton front aux lauriers et ton nez aux nazardes.


XXV

M. de La Place qui avait acquis quelque réputation par la traduction qu’il avait faite, et qu’il continue, du Théâtre anglais, ne la soutient pas par les ouvrages qu’il compose. Il y a environ un mois qu’il donna une tragédie intitulée Jeanne d’Angleterre,

  1. Mémoires pour servir à l’histoire de Louis XIV.