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honorer la déesse. Abrocome aperçoit Anthia parmi les jeunes filles ; Vénus même n’était pas plus belle. Il sent percer aussitôt son cœur du trait le plus vif et brûle pour Anthia. À peine la cérémonie est-elle finie qu’il cherche à s’approcher d’elle. Anthia n’était pas plus tranquille, elle avait aussi ressenti l’effet de la présence d’Abrocome. Plusieurs obstacles s’opposent à leurs désirs. La belle Anthia devient triste et rêveuse, Abrocome sèche et languit ; tous deux sans le savoir adressent à la déesse les mêmes vœux. Enfin les parents des deux amants, inquiets de ce changement subit, vont consulter l’oracle, qui leur répond qu’il faut unir les deux amants, mais qu’après leur mariage, ils doivent s’exposer à des périls affreux sur terre et sur mer pour apaiser les dieux. On obéit. À peine nos deux époux ont-ils goûté les douceurs du mariage, qu’ils sont obligés de s’embarquer pour obéir à l’oracle. Après une navigation longue et tranquille, leur vaisseau est attaqué par des corsaires. Abrocome et Anthia sont faits esclaves : la beauté d’Abrocome fait tant d’impression sur Corimbe, chef de ces brigands, qu’il en devient passionnément amoureux. Euxine, confident de Corimbe, brûle pour Anthia ; mais ces deux époux, fidèles l’un à l’autre, ne répondent point aux désirs de leurs ravisseurs, qui, obligés de rendre compte de leur prise à leur maître, ne peuvent lui cacher les deux esclaves qu’ils voulaient se réserver. Ils sont conduit à Apsirte, qui était celui qui faisait armer ces corsaires. Abrocome et Anthia sont destinés à servir chez cet Apsirte. Sa fille devient passionnée pour Abrocome ; mais, comme il ne veut point satisfaire à ses désirs, elle emploie la calomnie pour le perdre. On le déchire de verges, on l’accable de chaînes, on le jette dans une affreuse prison. Pour surcroît de malheur, la fille d’Apsirte emmène avec elle Anthia dans une province éloignée. Là, elle veut la faire périr et charge de ce soin affreux un chevrier. Ce misérable en a pitié et la vend. Abrocome, quelque temps après, est reconnu innocent ; on lui rend sa liberté. Il s’en sert pour aller chercher sa chère Anthia. Il est pris encore par une troupe de brigands ; Anthia éprouve le même sort. Enfin ils essuient tour à tour la colère des dieux, et, après bien des épreuves cruelles, ils se revoient aussi tendres et aussi fidèles qu’avant toutes leurs disgrâces.

Je ne vous ferai point de réllexions sur le roman ; ce qu’il y