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NOUVELLES LITTÉRAIRES.


Dans le troisième acte, Cindor raconte à Zaïs qu’il n’a pu vaincre la constance de Zélidie. Mais Zélidie, qui ne voit plus Zaïs, le croit perfide et léger, et dans le même moment où elle déplore ses peines, Zaïs paraît sous les traits de Cindor et vient s’offrir pour servir de vengeance contre l’ingrat. Zélidie laisse couler des pleurs. Un mouvement de jalousie s’empare de Zaïs. Zélidie le détrompe aussitôt en lui disant qu’elle ne peut croire son amant infidèle, et que sans doute c’est un enchantement. Elle fuit, et Zaïs veut l’arrêter ; mais en vain.

Enfin, dans le quatrième et dernier acte, Zaïs, qui a éprouvé sa chère Zélidie, se fait connaître ; mais comme il ne peut conserver son immortalité en s’unissant à une mortelle, il renonce à tous les avantages de la divinité en répétant les mots de l’oracle qu’il avait entendus :

Le véritable amour se suffit à lui-même.

Mais Oromazès, roi des Génies, paraît, rend à Zaïs son immortalité et la lui fait partager avec Zélidie pour récompenser un amour si constant et si tendre.

Depuis longtemps, on n’avait pas vu au théâtre de sujet susceptible d’autant de spectacle par la variété qui y règne. Chaque scène représente un changement. Malheureusement notre Opéra est dérangé, et il n’a pas pu fournir la dépense qu’il aurait fallu faire. Dans des temps plus heureux, M. de Cahusac aurait joui du plaisir d’être lui-même un sylphe en nous procurant un spectacle aussi magnifique.

La musique de ce ballet a des censeurs et des partisans. En général, les airs de violon sont très-bien, les airs chantants fort inférieurs. On a dit qu’à l’ouverture on croyait être à l’enterrement d’un officier suisse, parce qu’un roulis de timbales couvertes d’une gaze annonce par un bruit sourd le débrouillement du chaos. Cependant il faut convenir que cette idée du musicien est assez naturelle. Ce n’est pas le moment des autres instruments ; ce n’est qu’à mesure que le développement se fait, que la Nature naît et s’anime. Alors vous entendez un léger frémissement, c’est le zéphir ; les flûtes résonnent, c’est le ramage des oiseaux ; les violons se joignent aux flûtes et, par leurs modulations variées, tantôt vives et tantôt lentes, vous représentent