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tesque : en voici la dernière strophe, qui est une des moins mauvaises :


Pour une conquête si belle
Lowendal, des mains de Louis,
Reçoit une palme immortelle,
Des vrais héros l’auguste prix.
Français si chers à Bellone,
Qu’un glorieux trépas couronne,
Vous mourez pour nous, mais la gloire
Vous porte au temple de mémoire
Nos hommages et nos encens.

— Un ingénieur nommé Bazin a régalé le public d’une épître éroïque sur les campagnes du roi. C’est un des ouvrages les plus burlesques qui aient paru depuis longtemps. L’auteur a voulu donner du grand ; il n’a donné que du gigantesque ; si la plupart de nos poëtes avaient entrepris de rendre le roi ridicule, ils ne devraient pas écrire autrement qu’ils le font. L’écrivain qui me donne occasion de faire cette réflexion est plus dans ce cas qu’un autre.


VII

L’Opéra donne depuis quelque temps une pastorale nouvelle intitulée Daphnis et Chloé[1], dont le sujet est le même que celui du roman qui porte ce nom. Les paroles sont d’un jeune homme de dix-huit ans nommé Laujon, et la musique de Boismortier. Ce musicien, plus abondant que savant, plutôt mauvais que médiocre, s’est acquis dans son métier la même réputation que l’abbé Pellegrin avait dans le sien. Celui-ci était obligé de faire des vers pour vivre, et est mort en poëte ; celui-là a fait une petite fortune par le grand nombre d’ouvrages qu’il a donnés au public. On les achète sans les estimer ; ils ne servent qu’à ceux qui commencent à jouer des instruments ou à quelques tristes bourgeois dans les concerts dont ils régalent

  1. Représentée pour la première fois le 28 septembre 1747.