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correspondance la roncière

enterrement à la Madeleine ; M. Deguerry a prononcé un petit discours, M. de Mackau étant marguillier de la Madeleine ; mais j’étais trop loin, je n’ai rien entendu.

J’ai une lettre intéressante de B. On s’étonne beaucoup du changement de Canrobert [1] en Pélissier [2] et réciproquement. Sans doute, ce sera Canrobert qui prendra Sébastopol, parce qu’il y aura derrière lui quelqu’un qui lui dira : Prenez. Ce qui frappe beaucoup de monde, c’est que Canrobert soit resté là bas dans une position subalterne. Cela, néanmoins, me plaît de lui, c’est dans son caractère. Quelle figure aurait-il fait à Paris s’il fût revenu ici n’ayant rien fait absolument ? Il perdait d’abord son bâton de maréchal.

Reste à savoir si l’état-major général est composé comme il l’était auparavant ; si cet état-major général est le même, Pélissier aura de la peine à agir. Néanmoins, cela ira mieux, je crois. On parle toujours de changement de ministère ; je n’y crois pas, ce n’est pas le moment, mais il y a une assez grande inquiétude partout ; on a toujours peur de quelque coup de tête de l’Empereur.

  1. Certain de Canrobert (1809-1895). Combat pendant quinze ans en Afrique (1835-1850) ; colonel de zouaves, se distingue par sa bravoure à l’assaut de Zaatcha. Général en 1850. Aide de camp du Prince président. Commande la ve division de l’armée d’Orient en 1854, est blessé à l’Alma, reçoit du maréchal de Saint-Arnaud, mourant, le commandement en chef, est blessé à Inkermann, résigne son commandement entre les mains de Pélissier en 1855, Maréchal de France en 1855. Commande le 3e corps de l’armée d’Italie et, en 1890, le 6e corps del’armée du Rhin ; défend glorieusement Saint-Privat, est bloqué dans Metz, avec Bazaine. Sénateur du Lot, puis de la Charente.
  2. Pélissier (1794-1894). Sous-lieutenant en 1815, lieutenant d’état-major en 1820 ; combat en Espagne, en Morée, en Algérie ; lieutenant-colonel en 1839, colonel en 1842, général en 1846, après la bataille de l’Isly ; gouverneur de la province d’Oran en 1848, et par intérim de l’Algérie en 1850. Commande en 1852 la première expédition de Kabylie. Commandant du 1ercorps de l’armée d’Orient, remplace Canrobert comme commandant en chef en 1855 : s’empare de la tour de Malakoff et fait capituler Sébastopol ; est nommé maréchal de France et reçoit le titre de duc de Malakoff. Vice-président du Sénat, ambassadeur à Londres en 1858, commande l’armée d’observation de Nancy pendant la guerre d’Italie. Gouverneur général de l’Algérie en 1860.