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correspondance la roncière


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À la baronne de La Roncière Le Noury. [1]
Lyon, le 2 avril 1855. [2]
Chère Enfant,

J’ai dîné hier chez le maréchal de Castellane [3], il y avait lui et six officiers d’un régiment de voltigeurs de la Garde qui passe à Lyon allant en Crimée, Je suis entré chez le maréchal au moment où six heures sonnaient à la pendule. Deux minutes après, on est venu lui annoncer que le lustre de la salle à manger venait de tomber sur la table, brisant pas mal de vaisselle ; heureusement que le dîner n’était pas servi. Il a pris cela très stoïquement. J’étais à sa droite, à table ; il a beaucoup causé, a beaucoup questionné surtout. Le dîner était copieux, mais, par hasard, je me suis aperçu qu’il ne valait pas le diable. Toutes les sauces étaient longues comme d’ici à Rome. Il a décidément un mauvais cuisinier.

Voici ce dont il s’agit ici. Le chemin de fer qui va dans quinze jours faire le trajet non interrompu de Paris à Marseille anéantit l’industrie de la plupart des bateaux

  1. (1) La plupart des lettres, connue celle-ci, sont adressées par l’amiral à sa femme, qu’il appelle toujours « Chère enfant ». Nous ne répéterons donc pas, à chaque lettre, le nom de la destinataire, nous bornant à préciser celles qui sont adressées à Mlle de La Roncière.
  2. Le capitaine de vaisseau de La Roncière s’est rendu à Lyon avec mission d’examiner l’utilisation possible pour les opérations de Crimée des vapeurs fluviaux du Rhône. L’inauguration du chemin de fer de Lyon à Marseille allait rendre disponibles un certain nombre de ces vapeurs. En raison de leur faible tirant d’eau, on avait pensé à les employer, particulièrement dans les eaux basses de la mer d’Azov.
  3. Boniface, comte de Castellane, né à Paris en 1788, mort à Lyon en 1862, commandant l’armée de Lyon. Maréchal de France en 1852.