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préface biographique

puis pour celle de Rome ; mais pour occuper un de ces grands postes diplomatiques où il eût excellé, il aurait fallu qu’il jetât par dessus bord tout ce qui l’attachait au passé : il en était incapable. Il n’avait jamais cessé ses relations avec le prince Napoléon et la princesse Clotilde ; et lorsqu’ils furent brutalement expulsés par M. Thiers, il ne songea pas à cacher son indignation.

La catastrophe qu’il avait prévue, bien avant 1870, mais qu’il n’avait pas cru devoir être si soudaine et si complète l’avait, dans les jours qui précédèrent et suivirent Sedan, aigri contre l’Empereur ; la douleur de la défaite lui avait fait un instant perdre son sang-froid. Mais le calme qui lui était naturel était vite revenu, lui permettant de connaître les évènements, de les étudier et de s’apercevoir qu’ils en appelaient eux-mêmes des jugements trop sommaires qu’une opinion exaspérée avait portés sur eux. Il se rendait compte, d’ailleurs, que l’immense popularité dont avait joui la personne de Napoléon III n’était pas entièrement anéantie, qu’elle pouvait revivre ; que les violences anarchiques des républicains et les dissensions des partis royalistes offraient quelques chances de restauration à un régime dont on pouvait espérer ce qu’il regardait comme essentiel au relèvement du pays : l’ordre et l’autorité. Sans donc s’engager avec personne, il prêtait l’oreille aux bruits qui lui venaient d’Outre-Manche lorsque, brusquement, le 9 janvier 1873, l’Empereur mourut. Pas un instant l’amiral n’hésita à faire sa cour au malheur ; mettant de côté toute prudence politique, il demanda l’autorisation de se rendre aux obsèques, y figura au premier rang et pleura auprès du cercueil.

On sait comment le parti impérialiste, un instant abattu par la mort de Napoléon III, se releva à la majorité du Prince impérial ; comment il gagna du terrain à chaque consultation du suffrage universel ; comment le jeune