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préface biographique

général mis à la tête d’une force cuirassée homogène ; pour ce commandement il n’y avait ni tradition ni précédent ; il lui appartenait d’en créer en faisant rendre à ces bâtiments nouveaux tout ce que l’on en pouvait attendre comme puissance militaire, comme navigabilité et résistance à la mer. Rien ne pouvait mieux convenir à un homme de son ambition et de son audace.

Il choisit avec le plus grand soin les officiers qui devaient être attachés à sa personne. Son chef d’état-major fut le commandant Pierre, qu’il avait connu à Terre-Neuve et qui depuis l’avait suivi en 1859 à la division des canonnières de l’Adriatique, puis au ministère de la Marine : homme d’une haute intelligence, d’une extrême bravoure et d’une foncière bonté mais d’un naturel bouillant qui parfois le rendait exigeant et dur. Cette raideur dans le service ne déplaisait pas à l’amiral, partisan d’une discipline très stricte dont il se réservait de modérer la rigueur, sachant se faire aimer autant que son chef d’état-major savait se faire craindre. Le lieutenant de vaisseau Vignes, qui, comme le commandant Pierre, devait mourir officier général, avait attiré l’attention de La Roncière alors qu’il commandait la station du Levant ; il le prit comme officier d’ordonnance. La distinction de ses manières, sa passion pour le métier et son goût pour les voyages plaisaient à l’amiral ; tous deux communiaient en une même active curiosité de l’esprit. Le capitaine de vaisseau Le Brix commandait le Magenta et l’abbé Métairie était aumônier de l’escadre. Je me revois enfant, avec mon père, en visite à Cherbourg, à bord du Magentaau milieu de tous ces disparus.

Le contre-amiral de La Roncière Le Noury avait à peine pris son commandement qu’il reçut l’ordre de rallier à Portsmouth la grande escadre qui s’y réunissait sous les ordres du vice-amiral comte Bouët-Willaumez, ayant le ministre à son bord, pour rendre à la flotte an-