Page:Correspondance intime de l'amiral de La Roncière Le Noury avec sa femme et sa fille, 1855-1871. T. 1,.djvu/24

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
xxiv
préface biographique

nos premiers cuirassés, et lui conquit, de la part de ses officiers d’alors, devenus depuis ses amis, une admiration qui, chez quelques-uns, s’élevait jusqu’à l’enthousiasme. Ceux qui ont eu l’honneur de connaître l’intrépide amiral Pierre savent quel souvenir il avait gardé du marin qu’il regardait comme son maître.

Lorsque La Roncière toucha Brest avec la pensée de recommencer la campagne au printemps suivant, le ciel diplomatique s’était assombri et les grondements précurseurs de la guerre d’Italie se faisaient entendre à l’horizon. Trop lié avec le prince Napoléon pour n′être pas mis par lui dans la confidence de ce qui se préparait, il comprit que l’Empereur voulait la guerre avec l’Autriche.

Le Prince, ministre de l’Algérie et des Colonies depuis le 24 juin, songeait à l’appeler auprès de lui, mais il ne s’en souciait guère, prévoyant que ce ministère ne serait pas de longue durée.

Loin de lui garder rancune de ses hésitations, le Prince le recommanda à l’Empereur, qui cherchait un homme sûr pour une mission diplomatique secrète. Coup sur coup, le commandant fit en plein hiver, deux voyages à Saint-Pétersbourg porteur de lettres confidentielles du souverain français au tsar Alexandre. Il s’agissait d’obtenir de la Russie, sinon une alliance, tout au moins une neutralité bienveillante, afin de contenir l’Allemagne et d’obliger l’Autriche à immobiliser des troupes sur ses frontières de l’Est. Il s’acquitta de sa mission avec une promptitude et un tact qui lui valurent aux Tuileries de hauts témoignages de satisfaction ; et, à peine de retour à Paris, il repartit pour Turin, où il assista, le 30 janvier 1859, au mariage du prince Napoléon avec la princesse Marie-Clotilde. Peu de jours après, la baronne de La Roncière Le Noury était nommée dame d’honneur de la nouvelle Altesse impériale.