Page:Correspondance intime de l'amiral de La Roncière Le Noury avec sa femme et sa fille, 1855-1871. T. 1,.djvu/20

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préface biographique

naissance, ses relations, sa réputation dans la marine Lui ouvraient toutes les portes. Il en profita et promena au travers des réceptions et des fêtes un regard connaisseur et amusé.

II avait retrouvé à Paris le prince Napoléon, qui, après avoir commandé bravement sa division sur le champ de bataille de l’Alma, s’était tout à coup dégoûté de la Crimée et en était revenu trop tôt, affrontant la médisance et la critique avec l’insouciance du qu’en dira-t-on qui devait lui valoir une croissante impopularité.

Il s’était passionné pour l’Exposition universelle, ouverte aux Champs-Elysées dans le nouveau Palais de l’Industrie ; président du jury des récompenses, il s’adjoignit La Roncière, qui, sans cesser de prendre une part active aux travaux du Conseil d’amirauté, lui apporta le plus intelligent concours et se trouva tout à fait en faveur auprès de lui. Cette faveur, il l’appréciait, sans doute, mais il était trop bon manœuvrier pour n’en pas apercevoir les écueils possibles ; le Palais-Royal ne lui faisait pas oublier que son avenir militaire dépendait des Tuileries. Aussi, le dimanche, lorsque l’Empereur sortait de la messe, il Lui arrivait parfois de passer devant un capitaine de vaisseau dont la tenue, à la fois aisée et respectueuse, le frappait, et qu’il se rappelait avoir déjà vu.


L’Exposition, le travail dans les bureaux du ministère, le monde et les plaisirs parisiens ne pouvaient retenir longtemps un marin qui aimait passionnément son métier. La Roncière, au bout de peu de mois, en eut assez et demanda un commandement à la mer. On ne pouvait guère le lui refuser ; cependant il se défiait de l’amiral Hamelin, ministre de la Marine, dont il n’était ni l’élève ni le favori.