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correspondance la roncière

kayaks et les umiaks. Le kayak est une petite pirogue qui ne contient qu’un seul homme qui y est hermétiquement enfermé ; en sorte qu’il ne fait qu’un avec la pirogue, où il ne peut pas entrer d’eau. Ils constituent le véritable homme-poisson. Tout homme a son kayak ; c’est avec cela qu’il va à la pêche et qu’il prend son unique nourriture et celle de sa famille, le poisson et quelques rares oiseaux de mer qu’il tue en leur lançant très habilement un dard. Le kayak est très élégant et va aussi vite que nos embarcations, mais il faut une grande habitude pour y aller ; quelques matelots ou mousses ont essayé et plus ou moins réussi ; un mousse a manqué de se noyer. J’ai voulu essayer ; mais il n’y a pas de kayak assez grand pour moi.

L’autre espèce de canot des naturels est l’umiak. C’est une grande embarcation qui peut contenir vingt personnes. Elle se compose d’une carcasse en bois à jour recouverte de peaux de phoques. Il en faut vingt-trois pour faire un umiak : ils sont tous de même dimension. Ceux qui ont peur en pensant que dans un canot on n’est séparé de l’eau que par une mince planche auraient bien plus peur dans un umiak, où on n’est séparé de l’eau que par une peau transparente, exactement comme du parchemin. Les naturels font néanmoins de longs voyages sur ces bateaux, mais toujours le long des côtes. Ce sont toujours des femmes qui rament dans ces bateaux ; il n’y a d’homme travaillant que celui qui gouverne. Ils ont une petite voile dont ils se servent rarement. Il n’y a ici que deux espèces de Danois : les négociants, et il n’y en a qu’un seul par établissement, et les ecclésiastiques. Le négociant est chargé de se faire donner à très bas prix par les naturels, pour des objets d’échange sans valeur, tout ce que peut produire le