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Par les beaux soirs d'été, j’irai dans les sentiers,[1]
Picoté par les blés, fouler l’herbe menue :
Rêveur, j’en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.
 
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais un amour immense entrera dans mon âme,
Et j’irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, — heureux comme avec une femme[2].

20 avril 1870

A. R.



Credo in unam.

Le Soleil, le foyer de tendresse et de vie,
Verse l’amour brûlant à la terre ravie,
Et, quand on est couché sur la vallée, on sent
Que la terre est nubile et déborde de sang ;
Que son immense sein, soulevé par une âme,
Est d’amour comme dieu, de chair comme la femme,
Et qu’il renferme, gros de sève et de rayons,
Le grand fourmillement de tous les embryons !

Et tout croît, et tout monte !
Ô Vénus, ô Déesse !

  1. Voir la version du recueil Demeny à Sensation.
  2. Ce poème se trouve dans les œuvres complètes sous le titre de Sensation. Nous publions intégralement les poèmes que Rimbaud joignait a ses lettres pour les variantes très importantes qu’ils présentent souvent par rapport à leur édition définitive.