u’on y prenne garde, je ne veux nullement dire, ce qui serait au contraire de ma croyance, que la grande, l’unique idée fixe du Rimbaud d’alors, n’est pas constamment présente dans les lignes de la lettre du Voyant, je prétends simplement que cette lettre n’en est pas l’expression parfaite et définitive et que son auteur n’a jamais dû, à aucun moment de sa vie, donner à cette étonnante réussite d’un instant d’inspiration, l’importance que lui ont attachée les commentateurs. Mais cette réserve, je tiens à bien marquer ce point, ne vaut que pour la forme. Car on pourrait tirer de La Saison en Enfer nombre de citations qui permettraient d’affirmer que le sec, terrible récit du drame intérieur n’est, dans sa presque totalité, qu’un commentaire à ce qu’on a appelé la théorie du Voyant. Autrement dit, la « voyance » aura été l’unique sens de la vie de Rimbaud, tout le temps qu’il en notait ces exemples que sont les Illuminations et sans doute aussi le livre perdu de la « Chasse spirituelle ».
Je crois donc donner sa juste valeur à la fameuse lettre en la considérant, replacée dans l’ensemble de la correspondance, comme le signe qui livre la vie de Rimbaud à son expérience surhumaine.
Aussi, comme un document brut, indiciblement précieux où se trouvent mis en jeu, non pas seulement