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Quant à la prétendue conspiration des princes de la maison de Lorraine contre Henri III, elle fut imaginée par le prince d’Orange et le duc d’Anjou, afin de pousser le roi à la guerre contre l’Espagne, dans laquelle, malgré toutes leurs excitations, ils n’avaient pu l’entraîner jusque-là. La déposition que Salcedo fit à Bruges, le 22 juillet, la lettre qu’il écrivit quelques jours après au duc d’Anjou[1], lui furent inspirées par la peur et par la promesse qu’il reçut de sa grâce, s’il se prêtait aux aveux exigés de lui ; les termes mêmes lui en furent dictés par trois ministres du duc, des Pruneaux, gentilhomme de sa chambre, Lavergne, capitaine de sa garde, et Charretier, son secrétaire. Il les rétracta expressément, le 29 août, au bois de Vincennes, en présence de la reine-mère, des cardinaux de Bourbon et de Birague, du chancelier, du garde des sceaux, du premier président de Thou, des sieurs de Lansac, de Bellièvre, de la Guerle, des secrétaires d’État Brulart et Pinard, disant que le contenu en était faux et mensonger, ajoutant qu’il ne connaissait pas même la plupart des personnes qu’il avait dénoncées comme ayant été en rapport avec lui ; il renouvela cette rétractation devant le roi, le 12 octobre, et le jour suivant, à la Bastille, quand il fut interrogé par les commissaires du parlement ; enfin, au moment de mourir, et alors que la question extraordinaire à laquelle il venait d’être appliqué avait épuisé ses forces, il répéta derechef que ses dénonciations de

  1. De Thou, liv. LXXV, fait connaître le contenu de ces deux pièces, dont le texte littéral a été publié par M. Taschereau, Revue rétrospective, 2e série, t. II, pp. 559 et suiv.