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— XCII —

l’édit du 15 mars 1580, qui proscrivait Guillaume comme « seul auteur et promoteur des troubles des Pays-Bas, principal perturbateur de tout l’État, et en somme peste publique chrétienne, » réveilla ses premiers instincts.

Au mois de février 1582, voyant que le ban publié contre le prince restait sans effet, il partit du comté de Bourgogne, résolu d’être lui-même l’exécuteur de la sentence émanée du Roi. Quand il arriva à Luxembourg, on venait d’y recevoir la nouvelle de l’attentat de Jaureguy ; presque tout le monde, dans cette ville, croyait le prince d’Orange mort. Gérard déclara depuis — et la chose paraît fort vraisemblable — qu’il s’en était réjoui, parce qu’ainsi justice était faite, sans qu’il fût dans la nécessité de s’exposer à un danger certain. Il se mit alors, en qualité de clerc, au service de Jean Dupré, son cousin et bourguignon comme lui, qui était secrétaire du comte Pierre-Ernest de Mansfelt, gouverneur de la province de Luxembourg.

Il sut, bientôt après, que Guillaume n’avait pas succombé à sa blessure. Cela le fit revenir au projet pour lequel il avait quitté son pays, et il se promit fermement de l’accomplir, quoi qu’il pùt en résulter. Il espérait en trouver l’occasion, quand le comte de Mansfelt serait appelé à l’armée du Roi, pour y exercer sa charge de maréchal général : son plan était de s’éloigner en secret du camp, dès que l’armée approcherait d’un lieu où l’on aurait signalé la présence du prince d’Orange, et d’aller trouver ce prince sous un faux nom. Afin de s’insinuer dans ses bonnes grâces, il ferait montre d’une grande ferveur pour la religion évangélique ; en outre, il lui