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CHAPITRE III.

Quel spectacle de voir une multitude de malheureux qui tous voulaient se dérober à la mort, et qui


    avait été préparée dans ce port, et devait en partir au printemps de 1815, sous le commandement du capitaine de vaisseau Bouvet, l’un de nos meilleurs officiers, si les événemens extraordinaires du mois de mars n’y eussent mis obstacle. Le capitaine qui a perdu la Méduse commandait à cette époque une corvette attachée à cette expédition. Indépendamment des instructions qu’il reçut alors, et qu’il a pu méditer pendant près de deux ans, il a été à même d’acquérir une foule d’autres renseignemens précieux sur la navigation qu’il allait entreprendre, dans ses entretiens fréquens avec l’habile capitaine commandant l’expédition, et les officiers de marine qui en faisaient partie ; entretiens qui roulaient presque toujours sur l’objet de leur mission, et sur les moyens de la bien remplir. Toutes les circonstances de cette navigation y ont été prévues, tous les dangers de la route signalés. Comment le capitaine de la Méduse n’était-il pas plus instruit en 1816, sur des matières qui avaient été tant de fois discutées devant lui ? Je ferai encore une observation avant de passer outre. Les malheurs inouis arrivés à l’équipage de la Méduse, proviennent principalement de ce que le capitaine de cette frégate, commandant les forces navales de l’expédition, n’a pas voulu naviguer de conserve avec la division. Ayant profité de la marche supérieure du bâtiment qu’il montait, pour devancer les autres, il ne s’en est plus trouvé un seul pour recueillir son équipage, quand la frégate a été perdue. Il faisait quelquefois tellement forcer de voiles à la Méduse que la Corvette l’Écho, voulant la suivre, a compromis plus d’une fois sa mâture.
    C’est dans la conduite du capitaine de la Méduse entre