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CHAPITRE XV.

pagnent toujours les abus, l’injustice et la corruption. Quand la faveur et le caprice sont les seules lois écoutées ; quand l’intrigue tient lieu de mérite ; quand la cupidité remplace une honorable industrie ; quand le vice et la bassesse sont des titres aux distinctions et les véritables moyens de parvenir ; quand les honneurs ne sont plus synonymes avec l’honneur, alors l’état social ne présente que désordre et anarchie ; alors on renonce aux vertus obscures, aux produits laborieux, pour suivre les voies faciles de la corruption ; alors les hommes sages, pour qui l’estime publique est une recommandation stérile, les véritables serviteurs du Roi, les fidèles amis de la patrie, sont forcés de disparaître, de s’écarter des emplois, et l’intérêt public, aussi-bien que celui de l’humanité, sont misérablement sacrifiés aux plus vils calculs, aux plus coupables passions.

Qui veut la fin, veut les moyens. La fin doit être aujourd’hui de tout disposer d’avance, et plutôt que plus tard, afin de réparer, dans l’Afrique, les pertes et les désastres passés que des événemens irrémédiables ont produits aux colonies occidentales, et de substituer à leurs richesses, à leur prospérité„ dont la décadence progressive est désormais inévitable, de nouveaux élémens de richesse et de prospérité ; les moyens seront de transporter dans ces contrées si long-temps désolées par notre impitoyable avarice, les lumières, la culture et l’industrie. Par là nous verrons s’élever sur ce vaste continent de nombreuses colonies qui rendront à la métropole tout l’éclat, tous les avantages de son an-