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CHAPITRE XV.

mes et d’argent qu’il n’en faudrait pour coloniser l’Afrique. On sait aussi que la Martinique est un sol usé, et que ses produits seront de plus en plus bornés ; que le peu d’étendue de la Guadeloupe restreint sa culture dans un cercle assez étroit, et ne lui permet pas de présenter une masse de productions qui ajoute un degré d’activité bien sensible dans le mouvement qu’un pays tel que la France doit imprimer à toutes les parties de son industrie agricole et commerciale. Il n’est pas douteux que la nature a placé dans la Guyane française les élémens d’une grande prospérité ; mais cet établissement est à créer en entier ; tout s’est constamment réuni pour en prolonger l’enfance. Il manque de bras et comment y porterez-vous le nombre nécessaire de cultivateurs, quand vous avez proclamé l’abolition de la traite ?

L’abolition de la traite ! Voilà le principe fécond en conséquences qui doit commander à tout gouvernement éclairé, de se hâter de changer tout son système colonial. Ce serait en vain que la contrebande s’efforcerait de prolonger un odieux commerce, et d’en arracher quelques ressources précaires ; ce triste avantage ne ferait qu’entretenir la plaie qui a frappé les colonies occidentales, sans pouvoir en procurer la restauration, telle que l’entendent ceux qui veulent absolument fonder leur prospérité sur l’exploitation, en coupe réglée, d’une des espèces du genre humain. Non-seulement, la traite est abolie par la religion, par les traités, par le consentement de quelques puis-