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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

avec eux des sables que la mer repousse vers la côte : c’est ce qui forme une barre à l’embouchure du fleuve ; mais ces mêmes courans se sont frayé un passage, qu’on nomme passage de la barre. Cette passe a environ 200 mètres de largeur et 3 à 6 mètres de profondeur. Très-souvent ces dimensions varient en moins ; mais dans tous les temps on ne peut y faire passer que des navires tirant quatre mètres d’eau au plus ; l’excédant est très-nécessaire pour le tangage, qui est toujours assez fort sur cette barre. Les lames qui la couvrent continuellement sont très-grosses et fort courtes : lorsque le temps est mauvais, elles brisent avec fureur et intimident les marins les plus intrépides.

Le bras occidental du fleuve est séparé de la mer par une pointe nommée pointe de Barbarie. Il est inconcevable que cette langue de terre, qui n’a pas deux cent cinquante mètres dans sa plus grande largeur, et qui n’est que de sable, puisse résister aux efforts du fleuve, qui tend toujours à la détruire, et à ceux de la mer, qui brise dessus, quelquefois avec une fureur telle qu’elle la recouvre tout entière, et vient même, après avoir traversé le bras de la rivière, expirer sur le rivage de l’île Saint-Louis. Presque en face du château, et sur la pointe de Barbarie, est une petite batterie de six pièces au plus, qu’on appelle Fort de Guétandar : ce fort est sur le haut d’une butte de sable qui a été formée par le vent et qui s’accroît journellement : elle est même déjà assez haute, et se