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CHAPITRE XIII.

chutes. La seconde manière que le docteur Bergeron suivit avec plus de succès, était opposée à la première ; il ne faisait que peu ou point vomir, cherchait à calmer les symptômes, à relever les forces par des amers, et enfin administrait le kina.

Les noirs qui ont, comme tous les peuples, leur médecine et leur pharmacopée, et qui dans cette saison sont sujets aux mêmes maladies que les Européens, ont recours tout d’abord à un remède plus héroïque, et ceux des soldats campés à Daccard qui en ont fait usage, s’en sont généralement bien trouvés. Le prêtre ou marabou qui leur offrait souvent le secours de son art, dès l’invasion de la fièvre, leur faisait prendre un grand verre de punch au rhum très-chaud, avec une légère infusion de ce petit piment, connu sous le nom de poivre de Cayenne. Une transpiration extraordinaire terminait le plus souvent cet accès. On évitait ensuite pendant quelques jours de se promener au soleil, et on se nourrissait en petite quantité de poisson rôti et de cous-cous dans lequel on avait mêlé une suffisante quantité de feuilles de casse, d’espèces différentes, pour purger lentement. Afin d’entretenir la sueur, et selon le docteur noir, pour fortifier la peau, on faisait de temps à autre des lotions chaudes de feuilles de palma-christi et de casse-puante. Cet emploi du rhum, réprouvé par la religion musulmane, et qui est pour ce pays une production étrangère, fait croire que ce remède n’est pas fort ancien chez les noirs.

De tous côtés, ce n’était que des malheureux qui