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CHAPITRE VIII.

mer pendant les vents et les ouragans du solstice d’été, se tiennent rarement sur le rivage, proprement dit, parce qu’ils sont trop tourmentés, ainsi que leurs animaux, par des myriades de mouches extrêmement importunes et qui n’abandonnent point les bords de la mer. Dans cette même saison, l’apparition des cousins ou maringouins, les porte à s’éloigner du Sénégal ; car leur bétail alors, sans cesse piqué par ces insectes, en devient furieux et malade.

Les nôtres rencontrèrent quelques-uns de ces Maures, et les forcèrent en quelque sorte à leur servir de guides. Après avoir continué leur marche en longeant les bords de la mer, le 11 au matin, ils aperçurent le brick l’Argus qui croisait pour donner des secours à ceux qui avaient fait côte. Le brick les eut à peine découverts, qu’il vint très-près du rivage et mit en travers ; il envoya une embarcation à terre et leur fit parvenir du biscuit et du vin. Le 11 au soir, ils rencontrèrent d’autres indigènes et un Irlandais, nommé Karnet, capitaine marchand, qui, de son propre mouvement, était parti de Saint-Louis dans l’intention de porter des secours aux naufragés ; il parlait la langue du pays et avait pris les mêmes habillemens que les Maures. Après les souffrances et les privations les plus cruelles, ceux de ces infortunés qui composaient les équipages du canot major, de celui dit du Sénégal, vingt-cinq hommes de la chaloupe et quinze personnes de la pirogue arrivèrent à Saint-Louis, le 13 juillet, à sept heures du soir, après avoir