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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

troupe entre deux dangers, et rendait leur position très-difficile à défendre. À chaque instant il se présentait des hommes armés de couteaux, de sabres et de baïonnettes ; plusieurs avaient des carabines dont ils se servaient comme de massues. Ils faisaient tous leurs efforts pour les arrêter, en leur présentant la pointe de leurs sabres ; mais, malgré toute la répugnance qu’ils éprouvaient à combattre leurs malheureux compatriotes, ils furent cependant forcés de se servir sans ménagement de leurs armes. Plusieurs des révoltés les assaillaient avec furie ; il fallut les repousser de même. Quelques ouvriers reçurent dans cette action de larges blessures ; celui qui les commandait peut en compter un grand nombre reçues dans les différens combats qu’ils eurent à soutenir. Enfin leurs efforts réunis parvinrent à dissiper ces masses qui s’avançaient sur eux avec rage.

Pendant ce combat, M. Corréard fut averti par un de ses ouvriers, restés fidèles, qu’un de leurs camarades, nommé Dominique, s’était rangé parmi les révoltés, et qu’il venait d’être précipité dans la mer. Aussitôt, oubliant la faute et la trahison de cet homme, il s’y jette après lui à l’endroit d’où l’on venait d’entendre la voix de ce misérable demandant du secours ; il le saisit par les cheveux, et il a le bonheur de le ramener à bord. Dominique avait reçu dans une charge plusieurs coups de sabre dont un entr’autres lui avait ouvert la tête. Malgré l’obscurité, nous reconnûmes cette blessure, qui nous parut très-considérable. Un