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544 ÉTUDE

TITE.

Que faire donc, Madame?

��Assurer votre vie ; Et s'il y faut enfin la main de Domitic... Mais adieu. Sur ce point si vous pouvez douter, Ce n'est pas moi, Seigneur, qu'il eu faut consulter.

TiTE, à Bérénice qui se retire.

Non, Madame; et dût-il m'en coûter trône et vie, Vous ne me verrez point épouser Domitie. Ciel, si vous ne voulez qu'elle règne eu ces lieux. Que vous m'êtes cruel de la rendre à mes yeux!

Cependant le peuple murmure, et Philon, ministre de Bérénice, rapporte à la reine ce que les Romains disent d'elle :

Elle a bien servi Rome, il le faut avouer; L'Empereur et l'Empire ont lieu de s'en louer; On lui doit des honneurs, des titres sans exemples : Mais enfin elle est reine, elle abhorre nos temples, Et sert un Dieu jaloux qui ne peut endurer Qu'aucun autre que lui se fasse révérer; Elle traite à nos yeux les nôtres de fantômes.

Mais que fait à Bérénice l'opinion de Rome? C'est pour un seul Romain qu'elle a trahi sa patrie ; le Dieu des Juifs se venge :

Si j'ai vu sans douleur mon pays désolé, C'est à Tite, à lui seul, que j'ai tout immolé; Sans lui, sans l'espérance à mon amour offerte, J'aurais servi Solyme, ou péri dans sa perte; Et quand Rome s'efforce à m'arracher son cœur. Elle sert le courroux d'un Dieu juste et vengeur.

Que lui fait même la décision du Sénat qui s'assemble? S'il ose la bannir, elle est sûre de rester. Contre toutes les voix des sé- nateurs elle ne veut qu'un suffrage, celui de leur maître à tous. Que Tite lui échappe, elle s'en consolera pourvu qu'il échappe aussi à sa rivale, pourvu qu'elle puisse lui donner une femme de sa main, pourvu que Fimpératrice soit sa « créature ». Les amis de Domitian, son allié, gagneront le Sénat ; pour elle, elle n'aura point de peine à reconquérir l'empereur; elle le sent et le dit :

Je vous réponds de tout pourvu que je le voie.

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