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SUR OTHON 471

Mais, comme le mérite est en notre puissance,

La lionte d'un destin qu'on vit mal assorti

Fait d'autant plus d'iiouneur quand on en est sorti.

Quelque tactie en mon sang que laissent mes ancêtres,

Depuis que nos Romains ont accepté des maîtres,

Ces maîtres ont toujours fait choix de mes pareils

Pour les premiers emplois et les secrets conseils :

Ils ont mis en nos mains la fortune publique;

Ils ont soumis la terre à notre politique;

Patrocle, Polyclète, et Narcisse, et Pallas,

Ont déposé des rois et donné des Etats.

On nous élève au trône au sortir de nos chaînes;

Sous Claude on vit Félix le mari de trois reines ;

Et quand lamour en moi vous présente un époux,

Vous me traitez d'esclave et d'indigne de vous !

Madame, en quelque rang que vous ayez pu naître.

C'est beaucoup que d'avoir l'oreille du grand maître.

Vinius est consul, et Lacus est préfet;

Je ne suis l'un ni l'autre, et suis plus en effet;

Et de ces consulats, et de ces préfectures,

Je puis, quand il me plaît, faire des créatures :

(ialba m'écoute enlin; et c'est être aujourd'hui.

Quoique sans ces grands noms, le premier d'après lui.

Voilà un affranchi bien superbe ; mais cette hauteur n'a rien d'invraisemblable : Martian ne lient-il pas en ses mains le sort d'Othon, qu'aime Plautine ? Si Plautiue ne le repousse pas, ne peut- il point faire adopter Othon par Galba, au lieu de Pison? Nous com- prenons qu'après avoir imploré, il menace : car Vinius est le père de Plautine, et Vinius a peur de lui. Librement, cyniquement, il ouvre son àme au préfet Lacus, qui lui reproche de sacrifier les intérêts de la politique à ceux de son amour :

��J'espère en Vinius, si je n'espère en elle; Et l'offre pour Othon de lui donner ma voix Soudain en ma faveur emportera son choix.

LACUS.

Quoîl vous nous donneriez vous-même Othon pour maître?

MARTIAN.

Et quel autre dans Rome est plus digne de l'être?

LACUS.

Ah ! pour en être digne, il l'est, et plus que tous; Mais aussi, pour tout dire, il en sait trop pour nous.

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