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390 ETUDE

Et de Servilius l'astre prédominant

Dissipa tout d'un coup ce bonheur étonnant.

Ce grand roi fut défait, il en perdit la vie,

Et laissait sa couronne à jamais asservie,

Si, pour briser les fers de son peuple captif,

Rome n'eût envoyé ce noble fugitif.

Depuis que son courage à nos destins préside.

Un bonheur si constant de nos armes décide.

Que deux lustres de guerre assurent nos climats

Contre ces souverains de tant de potentats,

Et leur laissent à peine, au bout de dix années.

Pour se couvrir de nous l'ombre des Pyrénées.

Rome est donc victorieuse, mais divisée; les nations étrangères sont tenues en respect, mais non pas asservies. En de telles cir- constances, le rôle de Sertorius pouvait être grand encore. Sou caractère inspire une telle estime même à ses adversaires que Pompée lui demande une entrevue, sans autre garantie que sa foi:

La parole suftit entre les grands courages.

C'est cette entrevue fameuse qui ouvre le troisième acte, composé seulement de deux scènes ; c'est elle sans doute qui arrachait à Tu- renne ce cri : « Où donc Corneille a-t-il appris l'art de la guerre? » IMais ce ne sont pas seulement deux soldats qui sont en présence; ce sont deux politiques, deux hommes d'État, deux Romains. « 11 semble que Corneille ait eu des mémoires particuliers sur les Romains, » dit Fontenelle à propos de cette même scène, que M. Cousin juge très supérieure aux scènes analogues de Racine, même au grand discours de Mithridate.

SERTOIUUS.

Seigneur, qui des mortels eût jamais osé croire Que la trêve à tel poiut dût rehausser ma gloire; Qu'un nom à qui la guerre a fait trop applaudir Dans l'ombre de la paix trouvât à s'agrandir? Certes, je doute encor si ma vue est trompée, Alors que dans ces murs je vois le grand Pompée; Et quand il lui plaira, je saurai quel bonheur Comble Sertorius d'un tel excès d'honneur.

��Deux raisons. Mais, Seigneur, faites qu'on se retire, Atin qu'en liberté je puisse vous les dire. L'inimitié qui règne entre nos deux partis

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