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SUR OEDIPE 357

sur lui, CEdipe reste debout encore et fait face à. l'orage. Le peuple murmure? que lui importe! S'il s'exile, il veut s'exiler voloûtai- rcment, et il formule en termes hautains la théorie du droit divin le plus pur :

Je vais donc à Corinthe achever mon supplice. Mais ce n'est pas au peuple à se faire justice : L'ordre que tient le Ciel à lui choisir des rois Ne lui permet jamais d'examiner son choix, Et le devoir aveugle y doit toujours souscrire Jusqu'à ce que d'en haut on veuille s'en dédire. Pour chercher mon repos, je veux bien me bannir ; Mais, s'il me bannissait, je saurais l'en punir; Ou, si je succombais sous sa troupe mutine. Je saurais l'accabler du moins sous ma ruine.

Mais sa dernière illusion lui est arrachée : le roi de Corinthe, Polybe, vient de mourir en déclarant qu'OEdipe n'est pas son tifs. L'horrible secret se révèle ; mais alors, par un revirement tou- chant, celle qui bravait OEdipe tout-puissautplaiatOEdipc victime de la destinée. Ce n'est pas lui qui a tué Laïus, c'est le Destin qui a emprunté son bras. On a plaisir à entendre Dircé, revenue à des sentiments plus doux, s'écrier en face du << tyran » humilié :

Quel crime avez-vous fait que d'être malheureux ?

Œdipe émeut sa pitié maintenant ; il méritera bientôt son ad- miration par le courage avec lequel il supporte les coups du sort :

��Parmi de tels malheurs que sa constance est rare ! II ne s'emporte pomt contre un sort si barbare ; La surnrenante horreur de cet accablement Ne coûte à sa grande àme aucun égarement; Et sa haute vertu, toujours inébranlable. Le soutient au-dessus de tout ce qui l'accable.

��Souvent, avant le coup qui doit nous accabler, La nuit qui l'enveloppe a de quoi nous troubler; L'obscur pressentiment d'une injuste disgrâce Combat avec ell'roi sa confuse menace ; Mais, quand ce coup tombé vient d'épuiser le sort Jusqu'à n'en pouvoir craindre un plus barbare effort, Ce trouble se dissipe, et cette àme innocente. Qui brave impunément la fortune impuissante,

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