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Sur l'armée et la cour je vous vois souveraine,

Le Roi n'est qu'une idée, et n'a de son pouvoir

Que ce que par pitié vous lui laissez avoir. 870

Quoi! même vous allez jusques à faire grâce!

Après cela, Madame, excusez mon audace;

Souffrez que Rome enfin vous parle par ma voix :

Recevoir ambassade est encor de vos droits;

Ou, si ce nom vous choque ailleurs qu'en Arménie, 875

Comme simple Romain souffrez que je vous die

Qu'être allié de Rome, et s'en taire un appui,

C'est l'unique moyen de régner aujourd'hui;

Que c'est par là qu'on tient ses voisins en contrainte,

Ses peuples en repos, ses ennemis en crainte ; 880

Qu'un prince est dans son trône à jamais affermi

de sa force depuis le xvii° siècle. Au roi qui lui demande comment il supporte la mort de sa fille, le vieil Horace répond :

Siie, avec déptaisir, mais avec patience. {Horace, IVoS.) Cléopâtre expirante ne trouve pas de terme plus énergique pour eslialer su fureur :

C'est le seul déplaisir qu'en mourant je reçoi. {hoaoguni:, 181i.)

869. N'est qu'une idée, une apparence, un fantôme de roi. C'est le sens étymo- logique, alors moins rare qu'aujourd'hui. « Corneille a dit très heureusement dans Sertorius :

" Pe pareils lieutenants n'ont de chefs qu'en idée, et Voltaire n'a pas condamné ce vers, qui est même, en quelque sorte, passé en proverbe. » (Palissot.) Le même Corneille a écrit, plus énergiquement encore :

Général en idée, et monarque en peinture.

Voyez la note du v. 1641 de liodogune, et les exemples de Racine que nous y citons. On disait tout aussi bien en prose : « Ce ne sont plus rien que des idées ou des fantômes, des façons de chevaux. » (Molière, Avwe, III, 5.)

871. C'est une réponse ironique au v. 863, ou Laodice a dit si expressivement d'.Mtale : « Mon refus lui fait grâce. » Flaminius joue sur les mots et rappelle que le droit de grâce est un des droits essentiels du souverain.

876. Die, ancien subjonctif, pour dise, n'est point une licence poétique ; Vauge- las ne proscrit point cette forme, dont on trouve d'innombrables exemples avant Corneille et de son temps, mais que Thomas Corneille a corrigée partout ou il l'a pu, dans l'édition de 1692. Il a dû la laisser subsister à la fin de certains vers :

Elle vaut bien un trône, il faut que je le die. (ttodogiine, 135.) Permette? que tout haut je le die et redie. {Psyché, 1100.)

878. Cela est vrai historiquement; mais si de pareilles affirmations inspirent à Prusias une terreur salutaire, elles sont faites pour blesser l'orgueil altier de Laodice.

879. Tenir en contrainte, c'est dominer en contenant :

Ainsi je les tiendrai l'un et l'autre en contrainte. {Attila, 65.)

881. Bans son trône, et non sur son trône. C'est que le mot trône désignait, non seulement le siège royal lui-même, mais tout l'appareil fermé de balustres ou ce siège était enfermé :

Je serais dans le trône où le Ciel m'a fait nailre. {Pompée, 1090.)

Voyez les t. 220 de Cinna et 1188 de Polyeucte.

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