Page:Corneille Théâtre Hémon tome3.djvu/96

Cette page n’a pas encore été corrigée

80 POMPÉE

Après tout, c'est ma sœur, oyez sans repartir

CLÉOPATRE.

Ah! s'il est encor temps de vous en repentir,

Affranchissez-vous d'eux et de leur tyrannie ;

Rappelez la vertu par leurs conseils bannie :

Cette haute vertu dont le ciel et le sang 275

Entlent toujours les cœurs de ceux de notre rang.

PTOLOMÉE.

Quoi! d'un frivole espoir déjà préoccupée,

Vous me parlez en reine en parlant de Pompée;

Et d'un faux zèle ainsi votre orgueil revêtu

Fait agir l'intérêt sous le nom de vertu! 280

Confessez-le, ma sœur, vous sauriez vous en taire.

N'était le testament du feu roi notre père :

Vous savez qu'il le garde.

CLÉOPATRE.

Et vous saurez aussi Que la seule vertu me fait parler ainsi,

271. Après tout, locution familière toute française, que Corneille affectionne et qu'il emploie dans les situations les plus pathétiques :

Il est tard, après tout, de m'en vouloir dédire. {Cinna, 137.)

Le verbe ouïr est plus souvent employé par Corneille et ses contemporains que par les modernes, surtout à l'impératif :

Oyez, dit-il ensuite, oyez, peuple, oyez, tous. {Polyeucte. 840.)

274. Rappelez, revoca fin animumj. Au v. 1044 de Polyeucte, Corneille avait écrit déjà :

Il rappellenn amour fi grand peine banni.

Rappelez, rappelez cette vertu sublime. [Cinna, 1345.)

Dans ce dernier exemple, vertu est pris dans le même sens qu'ici, celui du latin virtus, générosité, courage.

276. Au V. 1114, enfler le courage est employé avec une nuance de sens un peu différente, et s'applique à la vanité que César tire de ses victoires. C'est généralement, en ell'et, l'orgueil, et non, comme ici, la vertu, qui enfle le cœur ; mais alors enfler est pris dans un sens défavorable, tandis qu'ici le sens est : cette noblesse, cette Derté de la race qui agrandit notre âme et l'élève au-dessus des âmes vulgaires.

L'orgueil de ma naissance enfle encor mon courage. {Rodogune, 1228.)

Le brait qu'en tons lieux fit sa haute valeur,

Antant que ma naissance, enfla mon jeune cœur. {Sertorius, 772.)

Cette idée sur la générosité particulière aux princes, Cléopàtre la reprendra et la développera dans la scène i de l'acte II (v. 370 à 37f>).

282. N'était, locution elliptique, pour si ce n'était, s'il n'y avait... Corneille l'emploie dans la tragédie connue dans la comédie :

Tout cola serait peu. n'était que ma bonté

T'en accorde un oubli sans l'avoir mérité. {Mélite. 1G57.)

Je le trouvais en vous, n'eût été la bassesse

Qoi pour co cher rival contre moi s'intéresse. (S(rrtorius, Vf, S.)

�� �