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68 POMPÉE

Quels que soient leurs décrets, déclarez-vous pour eux,

Et, pour leur obéir, perdez le malheureux.

Pressé de toutes parts des colères célestes, 8S

Il en vient dessus vous faire fondre les restes;

Et sa tête, qu'à peine il a pu dérober,

Toute prête de choir, cherche avec qui tomber.

Sa retraite chez vous en effet n'est qu'un crime :

Elle marque sa haine, et non pas son estime; 90

Il ne vient que vous perdre en venant prendre port,

Et vous pouvez douter s'il est digne de mort!

11 devait mieux remplir vos vœux et notre attente,

Faire voir sur ses nefs la victoire flottante :

84 Fatis accède deisque.

Et cole felices, miseras fuge (Lucain, VIII, 486-87.)

85. Des colères, par les colères. « Colère, substantif, n'admet point de pluriel. » (Voltaire.) Ce mot s'employait pourtant alors au pluriel, et l'on sait que CorneiU* aime ces pluriels des noms abstraits :

Puissent briser mon chef les traits les plus sévères

Que laacent (les giands dieux les plus âpres colères. {Médée, 938.)

86. Dessus est ici préposition, comme dedans au v. 38 ; on retrouvera dessus ainsi constiuit aux v. 251, 9i2, 1330. Du temps même de Corneille, on prélérait sur iidessiis, et Corneille, pour se conformer à la règle établie parles grammai- riens, moilifia plusieurs vers de ses œuvres ; mais il dut y renoncer bientôt, car il aurait eu trop à faire.

88. Postquam nuUa manet rerum flducia, quœrit

Cnm qua oente cadat

Tlvssnlisqiie reus, nulla tellure receptns,

Sblliritat nostrum, quem nondum jjerdidit, orbem. (Lucain, VIII v., 40-.lSi)

On retrouvera ^ré/ de pour près de, prêt à, aur v. 1160 et 1681. Ces troii constructions s'employaient indilléremment l'une pour l'autre •

Peut-être que l'onzième esl prête déclaler.' {Cinna, 491.) De même. Corneille ne faisait aucune différence entre cAotr et tomber, qui, encore aujourd'hui, sont synonymes, en dépit des distinctions imaginées depuis.

Tout va choir en ma main ou tomber en la vôtre. {Rodognne, 180.) Seulement, choira, vieilli depuis le xvn» siècle. — Avec qui tomber, cette cons- truction elliptique de l'infinitif après un pronom relatif est assez, fréquente dans le théâtre de Corneille : « Je n'aurai gui tromper, n (Place Royale, 1455.)

90. Ici Photin ergote et déclame, on le sent trop.

91. Prendre port est l'expression même consacrée dans la langue nautiqu* pour arriver dans un port et s'y amarrer.

93. Votis tua fovimus arma (Lucain, VIII, B13.)

94. M. Liltré, qui cite ce vers, explique /7offin( pris au figuré par : ondoyant comme le Ilot; la victoire flottante signifierait donc : les drapeaux victorieux qui flottent, ondoient dans les .lirs. La inet:i;ihore serait d'une belle banlicsse; nous prcfcrons pourtant l'explication plus simple de M. .Mai ty-Laveaux • la victoire qui tlolle, vogue sur les eaux. Ce ne siérait point, d'ailleiir<, le seul cxempli! d'un (larticipi; s'accordant ainsi avec son sub-tantif; le théâtre de Corneille en olfre plusieurs, et, de nos jours même, le poète de la Légende dei tiècles a dit : « l'essaim des victoires chaulantes ».

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