Page:Corneille Théâtre Hémon tome3.djvu/73

Cette page n’a pas encore été corrigée

REMERCIEMENT 57

Certes, dans la chaleur que le ciel nous inspire, Nos vers disent souvent plus qu'ils ne pensent dire, Et ce feu qui sans nous pou se les plus heureux 35

Ne nous explique pas tout ce qu'il fait par eux. Quand j'ai peint un Horace, un Auguste, un Pompée, Assez heureusement ma muse s'est trofnpée, Puisque, sans le savoir, avecque leur portrait Elle tirait du tien un admirable trait. 40

Leurs plus hautes vertus qu'étale mon ouvrage N'y font que prendre un rang pour former ton image. Quand j'aurai peint encor tous ces vieux conquérants. Les Scipions vainqueurs et les Gâtons mourants, Les Pauls, les Fabiens, alors de tous ensemble 45

On en verra sortir un tout qui te ressemble, Et l'on rassemblera de leurs pompeux débris Ton àme et ton courage, épars dans mes écrits.

Souffre donc que pour guide au travail qui me reste J'ajoute ton exemple à cette ardeur céleste, 50

Et que de tes vertus le portrait sans égal S'achève de ma main sur son original, Que j'étudie en toi ces sentiments illustres Qu'a conservés ton sang à travers tant de lustres. Et que le ciel propice et les destins amis 55

De tes fameux Romains dans ton àme ont transmis. Alors de tes couleurs peignant leurs aventures, J'en porterai si haut les brillantes peintures Que ta Rome elle-même, admirant mes travaux. N'en reconnaîtra plus les vieux originaux, 60

Et se plaindra de moi de voir sur eux gravées Les vertus qu'à toi seule elle avait réservées, Cependaut qu'à l'éclat de tes propres clartés Tu te reconnaîtras sous des nîîmj empruntés.

Mais ne te lasse point d'illuminer mon àme, 65

Ni de prêter ta vie à conduire ma flamme, Et de ces grands soucis que tu prends pour mon roi Daigne encor quelquefois descendre jusqu'à moi. Délasse en mes écrits ta noble inquiétude,

Et tandis que sur elle appliquant mou étude, 70

J'emploierai pour te peindre et pour te divertir Les talents que le ciel m'a voulu départir, Reçois, avec les vœux de mon obéissance. Ces vers précipités par ma reconnaissance.

L'impatient transport de mon ressentiment 75

N'a pu pour les polir m'accorder un moment. S'ils ont moins-de douceur, ils en ont plus de zèle : Leur rudesse est le sceau d'une ardeur plus fidèle. Et ta bonté verra dans leur témérité, Avec moins d'ornement, plus de sincérité.

�� �