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ACTE IV SCÈNE UI. 1« 

CLBOPATRE.

On pen trop lent peut-être à servir ma colère,

Vous vous êtes lais-é prévenir par un frère?

11 a su me venger quand vous délibériez, 1S65

Et je dois à son bras ce que vous espériez ?

Je vous en plains, mon fils, ce malheur est extrême;

C'est périr en effet que perdre un diadème.

Je n'y sais qu'un remède ; encore est-il làcheux,

Étcaôact, incertain, et triste pour tous deux; 4270

Je périrai moi-même, avant que de le dire :

.Mais enfin on perd tout quand on perd un empire.

ANTIOGHUS.

Le remède à nos maux est tout en votre main,

Et n'a rien de fâcheux, d'étonnant, d'incertain;

Votre seule colère a fait notre infortune. 4275

Nous perdons tout. Madame, en perdant Rodogune :

Nous l'adorons tous deux; jugez en quels tourments

Nous jette la rigueur de vos commandenients.

L'aveu de cet amour sans doute vous offense :

Mais enfin nos malheurs croissent par le silence, 4280

Et votre cœur, qu'aveugle un peu d'inimitié,

S'il ignore nos maux, n'en peut prendre pitié.

Au point oîi je les vois, c'en est le seul remède.

CLÉOPATRE.

Quelle aveugle fureur vous-même vous possède?

��1265. « On ne peut imaginer que Cléopâtre Teuille dire ici autre chose «inon : Séleucus vient de tuer sa maîtresse et la vôtre. A ce mot seul, Antio- chu8 no doit-il pas entrer en fureur? » Voltaire n'a pas remarqué que ce» deux phrases étaient interrogatives : ce n'est pas un fait mensonger qu'affirme Cléopâtre, c'est une question qu'elle adresse a Antiochus. Dès lors, on com- prend que celui-ci n'en soit pas ému; d'avance il connaît b réponse : ne vient- il pas de voir Rodogune et de lui parler? Les critiques qui portent sur les vert suivants tombent donc d'elles-mêmes, et nous ne les reproduisons pas.

1270. Etonnant, comme fâcheux, a beaucoup perdu de sa force primitive. « On n'entend pas mieux, dit Voltaire, ce que c'est que ce couplet. Ces deux couplets paraissent remplis d'obscurité. » Ces obscurités très réelles ne sont-elles pas volontaires? « Cléopâtre, écrit M. Geruzez, insinue qu'Antiochus ferait une bonne affaire en tuant Séleucus. » S'il en esi ainsi, comment oserait-elle s'en expliquer à cœur ouvert av c Antiochus?

l-2"3. « Comment ce remède aux maux est-il dans la main de Cléopâtre ? Entend-il qu'en nommant l'aîné elle finira tout? Mais il dit : IVotts perdon>! lou\, en perdant Rodogune. Il n'y aura donc point de remède aux maux de celui qtri la perdra. » (Voltaire.) Antiochus veut dire simplement qu'un mot de Cléo- pâtre peut mettre fin à la douloureuse situation des àeur frères, forcés ou de s'aliéner â jamais le cœur de leur mère ou de tuer celle qu'ils aiment. De toute façon sans doute il y aura un malheureux, mais il n'y en aura pins qu'un, et son malheur lui pèsera moins.

1281. Un peu.' Antiochus est vraiment trop indulgent, t Quel laiîgage! s'é«he Voltaire. Et dans une telle occasion il parle avec la plus grande sou- mission, et Cléopâtre lui répond : quelle fureitr vous possède T > C'est préciso- ment parce qu'elle conoaii la soumission ordioaire de «on fils que Cléopâtro s'mqu'ète et s'indigne do ces velléitéf de résistance, ti timides qu'elles soient.

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