Page:Corneille Théâtre Hémon tome3.djvu/499

Cette page n’a pas encore été corrigée

ACTE m, SCÈNE V. 153

Et, voyant de ces maux l'épouvantable image, 1075

le me'sens affaiblir quand je vous encourage; io frémis, je chancelle, et mon cœur abattu Suit tantôt sa douleur, et tantôt sa vertu. Mon frère, pardonnez à des discours sans suite, Qui font trop voir le trouble où mon âme est réduite. 4080

SÉLEUCUS.

J'en ferais comme vous, si mon esprit troublé Ne secouait le joug dont il est accablé. Dans mon ambition, dans l'ardeur de ma flamme, Je vois ce qu'est un trône, et ce qu'est une femme, Et. jugeant par leur prix de leur possession, <085

J'éteins enfin ma flamme et mon ambition; Et, je vous céderais l'un et l'nutre avec joie, Si, dans la liberté que le ciel me renvoie, La crainte de vous laire un funeste présent Ne me jetait dans l'âme un remords trop cuisant. 4090

Dérobons- nous, mon frère, à ces âmes cruelles. Et laissons-les sans nous achever leurs querelles.

ANTIOCHUS.

Comme j'aime beaucoup, i'espère encore un peu.

��lois. Vertu, employé dans uu sens analogue, quelques vers pltu haut, a ici le sens de force d'âme, énergie gi'nérnise, opposée à douleur, c'est-à-dire i lâche désespoir.

lOSO. Var. « Et jugei par ce trouble où. mon Ame est réduite * (1647-56). Les derniers vers prononcés par Antiochus font oublier la fadeur des pre- miers et les froides abstractions dont ils sont chargés. Antiochus revient ici à la vérité de son caractère et de sa situation; par suite, ies vers sont plus pré- cis et plus fermes.

1081. J'en ferais comme vous (des discours t) n'est pas français, selon Vol- taire. C'est exagérer : la tournure n'est pas incorrecte, mais n'est guère poé- tique. On peut même prendre }'en feraU comme une lucuiion toute faite, aussi correcte qu'au v. 1508.

1084 « Il voit bien ce qu'est Rodogune ; mais il n'y a jamais eu que cette femme an monde qui ait dit : Tuez votre mère , si vous voulez que je vous épouse. Le trône n'a rien de commun avec la monstrueuse idée de la douce Rodogune. Ce qu'il y a de pis, c'est que lou» les raisonnements d'Antiochus et de Séleucus ne produisent rien ;il8 dissertent; les deux frères ne prennent au- cune résolution, et le malheur de leur personnage jusqu'ici est île ne rien faire, et d'attendre ce qu'on fera d'eux. » La première observation de Voltaire lui est inspirée par l'idée, inexacte, selon nous, qu'il se fait du caractère de Rodo- gune. La seconde est juste : oui, ce duo plaintif entre les deux frères ne fait guère avancer l'action ; il est peut-être exagéré cependant de dire qu'il ne pro- duit rien. Voyez l'Introduction.

1090. Cuisant, appliqué souvent à remords ;

Je sens au fond du cœur mille remords euisanti.

[Cinna, r. 803.)

Corneille dit de même ( on mal cuisant » {Cid., v. 128), de « cuisants mal- heurs » (Cinna, v. 40), un « cuisant chagrin » {Perlliarile, v. 1394), comme Ro- trou des « travaux cuisants » (Saint Genest, III, vu.)

1093. « Beaucoup et un peu, celte antithèse n'est pas digne du tragique, j Voltaire.) Pourquoi ? Le mot d'Antiochus, qui espèr* contre toute espérance).

�� �