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82 RODOGUNE.

Et pour rompre !e coup que mon cœur n'ose attendre.

Lui cédant de deux biens le plus brillant aux yeux, 85

M'assurer de celui qui m'est plus précieux :

Heureux si, sans attendre un fâcheux droit d'aîne>se,

Pour un trône inceriain j'en obtiens la princesse,

Et puis par ce partage épargner les soupirs

Qui naîtraient de ma peine ou de ses déplaisirs! 90

Va le voir de ma part, Timagène, et lui dire /

Que pour cette beauté je lui cède l'empire; Mais porte-lui si haut la douceur de régner,

surtout dans ses premières comédioB, et M. Marty-Laveaux fait obserrer que l'utage le justifie: un poème de Ronsard (le Tombeau de Charles /AT^ et trois pièces de Malherbe débutent ainsi. Les poètes contemporains, en usant ei abu- sant de donc ainsi construit, ne font que suivre ces exemples classiques. — Hasarder, mettre au hasard, exposer. — Prétendre moins, pour prétendre d rnoinx ; ce verbe, pris dans le sens d'aspirer à, réclamer, ambitionner, était au xvu"= siècle et peut être encore verbe actif, ou plutôt il est verbe actif ou verbe neude suivant l'occasion et la nuance :

A des partis plus hauts oe b«aa fils doit prétendre,

(£• Cid. I.) Voyez la grammaire de H. Chassang, p. 821-22.

84. Rompre le coup, locution familière i Corneille , qui emploie souvent rompre au figuré dans plusieurs sens.

hl. < Ce droit d'aînesse n'est point fâcheux pour celui qui aura le trône et Rodogune. Fâcheux d'ailleurs n'est pas noble. » (Voltaire. Si factieux n'est pas noble, comment Racine a-t-il osé dire :

De quel front soutenir ct/àeKtux entretien ?

[Britannieua, II, IL)

Comment Bossuet a-t-il pu parler de « maîtres fâcheux ? » {Hist. Il, vi ; Polit. VI.xiv ) « Fàdienx, dit M. Geruzez, convient dans la bouche d'Antiochus, qui aime tendrement son frère et Rodogune, et qui ne veut ni affliger l'un, ni con- traindre l'autre. » Fâcheux veut dire en effet ce qui fâche, et l'on sait que fâcher avait alors une toute autre force qu'aujourd'hui.

89. Epargner. On dit mieux : m'épargner.

90. « Les déplaisirs et la peine ne sont pas des expressions assez fortes pour la perte d'un trôno. » (Voltaire.) Toujours ia même iiiu^ion I Peine et dé- plaisir étaient des e.tpressions faibles du temps de Voltaire, mais très éner- giques du temps de Corneille. En des circonstances tragiques (liodogune, v, 4), Corneille place ce mot de déplaisir dans la bouche d'Antiochus et de Cléopâfre. Lorsque le vieil Horace et l'empereur Auguste nous parlent du déplaisir que leur causent, à l'un la perte de sa fille unique, à l'autre la conjuration qui me- nace sa vie (V, n; IV, iv), lorsque Racine (Androm., II, i; Atnalie, I, m) nous invite à compatir aux déplaisirs d'Andromaque ou de JTosabeth, ils ne se croient pas si au dessous du style tragique.

92 « Terme de comédie •, dit Voltaire du mot « beauté ». SoitI Mais alors Racine est comique aussi bien que Corneille ; car plus que lui encore, ilse plie à ce langage de la galanterio contemporaine, dans Britannicui, Andro- maque, Berruice, Lsther même.

S3. De même dans le Lid (III, ti), don Diègue dit k son fila:

Porte, porte |j1u8 haut le fruit de ta viotoire I

c'est-à-dire: relève, fais mieux valoir, n'abaisse pas ainsi la gloire de too triomphe. Voltaire critique porter haut pris dan.s le sens à'exalter. Le grec iic'i tt.i'i^',1 a'fttv, le latin nltins erigere, extoliere, ne peuvent-ils pas nous aider à mieux comprendre l'expresaiou An rornuillet

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