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de l'esprit, a eu Voltaire pour précepteur. Quant ;iu janséniste, il nous a tout l'air d'admirer Rodogune uniquement parce qu'il Oïl janséniste : homme de raison sévère, il doit aimer Gorne)l!«, qui parie avant tout à la raison et l'exalte jusqu'au sacrifice, homme de piemier mouvement et d'une sensibilité neuve en- ore, l'Ingénu comprend mieux liacine, qui louctie le cœur. Mais pour(|uoi tant élever Rodogune, pour lant la rabaisser en- suite? Nous osons dire, avec le poète,

qu'elle n'a mérité Ni cet excès d'honneur, ni cette indignité.

Mettre Rodogune au premier rang ('es tragédies de Corneille et montrer que tout y est obscur, révoltant ou invraisemblable, n'est-ce pas com[)rendre le théâtre entier de Corneille dans le inô"^e jugement sommairo?

Aussi Voltaire eut-il le triste honneur de fournir des cita- tions et des arguments aux étrangers*, envieux de notre gloire littéraire. Les flèches qu'il aiguisait finement en France, c'est contre la France que les critiques allemands les reti urnèreni, en y mêlant leui's pesants projeitiies. Eux aussi, conatre toute vé- rité, ils trouvèrent bon de supposer que Rodogune était le chef- d'œuvre incontesié de la tragédie française, et c'e^t 'a tragédie française qu'ils prétendirent frapper à mort en frappant Rodo- gune. Parti de ce faux principe, le plus célèbre d'entre eux, Les-ing, triomphe sans péiil et sans peine, comme sans mo- destie.

Le XXXV* chapitre de la Dramahirgie de Hambourg^ est cons^acré tout entier à l'examen de Rodogune, représentée à Hambourg le 5 juillet 1767, devant le roi de Danemark. « 11 nous sera permis, dit le dramaturge, de nous arrêter sur le chef-d'œuvre de ce grand homme. » Et il s'y arrête, et il y insisie, semble-t-il, avec un acharnement particulier; car ce n'est point sa Taute si le chef-d'œuvre du grand homme ne

��1. a 11 y a quelques années, il parut un Français, d'ailleurs grand admirateur: da nom de Corneille..., ot cependant il déclara que Rodoyune était un poëme très mal conçu et qu'il ne comprenait pas, dût lo diable l'emporter, commout «m aussi grand homme que le grand Corneille avait pu écrire quelque chose d^ ti absTirde... 11 va sans dire que c'est d'ordinaire un Français qui ouvre lat yeux aux étrangers sur les défauts d'un Français. » Lessing, Dramalurgif it Hambourg, \i. 159.

2. Traductioa de M. Crouslé. avec préface de M. Mézièrcs. p. 144 à 160.

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