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INTRODUCTION T

lion, en général, a chez lui moins d'éclat, de ïorce et de suite, si même, en certains passages, on sent quelque gêne et quel- que lourdeur de main, c'est qu'il a dû tout condenser pour tout faire tenir dans les limites plus étroiles des cinq actes classiques. Ne vantons point trop l'aisance avec laquelle se déploie l'imbroglio espagnol : Alarcon n'était point aux prises avec la règle tyrannique des trois unités, et peut supposer, par exemple, que trois jours se sont écoulés entre la scène do. balcon et les incidents qui suivent. Il est vrai que la durée dt) l'action française est de trente-sit heures environ, mais seule- ment en y comprenant les heures de nuit; car On dort dans le Meilleur, et Corneille l'avoue en se justifiant : « Tout l'inter- valle du 111*= au !¥"= acte vraisemblablement se consume â dormir par tous les acteurs ; leur repos n'empêche pas toute- tefois la continuité d'action entre ces deu.t actes, parce que ce IIl" n'en a pas de complète. Dorante le finit par le dessein de chercher les moyens de regagner l'esprit de Lucrèce, et, dès le commencement de l'autre, il se présente pour tâcher de parler à quelqu'un de ses gens et prendre l'occasion dé l'entretenir elle-même, si elle se montre '. »

L'unité de lieu semblait plus difficile à justifier; car houâ passons des Tuileries à la Place Royale. Mais, quoi! ne suffit- il pas que ces deux endroits soient contenus dans un même lieu général, qui est Paris, comme la scène de Ciniia ne sort pomt de Rome, bien qu'elle soit tantôt dans l'appartement d'Emilie, tantôt dans celui d'Auguste ? La duplicité de lieu n'existe donc pas, selon Corneille, si l'on ne change point de lieu dans le cours d'un même acte, surtout si l'on évite, et de varier les décorations d'un acte à l'autre, et de riommer les lieux particuliers : « Cela aiderait à tromper l'aiiditeur, qui, ne voyant rien qui lui marquât la diversité des lieux, ne s'en apercevrait pas, à moins d'une réllexioh malicieuse et cri- tique, dont il y a peu qui soient capables, la plupart s'atta- chant avec chaleur à l'action qu'ils voient représeiiter-. >» Abstenons-nous donc de toute « réflexion malicieuse et cri- '.ique)),et fermons les yeux sur les petites ruses qu'imagine le ,'rand Corneille pour tourner des règles dont lui-iîlêiilë, ^ans le vouloir, fait naïvement ressortir l'inanité.

Ceci accordé aux admirateurs du théâtre espagnol, et ces gaucheries reconnues, il nous sera permis d'admirer l'art tout personnel avec lequel cet imitateur, qui n'est pas un pla- giaire, saitaccommoder au goût français les traits souvent forcéa

1. Ibidem.

2, Discours des trois unités

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