ACTE n, SCÈNE II 113
Voulant nous affranchir, Brute s'est abusé : S'il n'eût puni César, Auguste eût moins osé.
CINNA.
La faute de Cassie et ses terreurs paniques
Ont fait rentrer l'Elat sous des lois tyranniques; 670
M.iis nous ne verrons point de pareils accidents
Lorsque Rome suivra des chefs moins imprudents.
MAXIME.
Nous sonimes encor loin de mettre en évidence Si nous nous conduirons avec plus de prudence; Cependant c'en est peu que de n'accepter ^oas 675
Le bonheur qu'on recherche au péril du trépas.
CINNA.
C'en est encor bien moins, alors qu'on s'imagine
fiuérir un mal si grand sans couper la racine.
Kmployer la douceur à cette guérison,
C'est, en fermant la plaie, y verser du poison. 680
MAXIME.
Vous la voulez sanglante, et la rendez douteuse.
CINNA.
Vous la Toulez sans peine, et la rendez honteuse.
MAXIME.
Pour sortir de ses fers, jcimais on ne rougit.
CINNA.
On en sort lâchement, si la vertu n'agit.
MAXIME.
Jamais la liberté ne cesse d'être aimable, 685
Et c'est toujours pour Rome un bien inestimable.
CINNA.
Ce ne peut être un bien qu'elle daigne estimer, Quand il vient d'une main lasse de l'opprimer.
667. S'est abusé, c'est-à-dire a été trompé dans son espérance. — Sur Brute et Cnssie (v. 669), voyez le v. 265.
669. Sur terreur panique, voyez la note du v. 305.
671. Accident a ici son vrai sens étymologique : re qui arriv« par ha=ard. Cinna. qui se donne ici pour un froid calculateur, et dont le caractère pourtant, »nx actes suivants, n'aura rien de systématique, prétend supprimer, ou tout au moins réduire la part du hasard dans les révolutions de la politique.
673. Mettre en évidence ne veut pas dire tout à fait mettre en lumière, selon P«.cception commune, mais bien fairi' connaître manifestement si
676. Le bonhetir qu'on recherche au péril du trépas, c'est la liberté reconqaiM par le sang versé, alors qu'il était si facile d« la conquérir pacifiquement. Ces ▼ers manquent de netteté ; Cinna et Maxime, comme bien des personnages de Corneille, ergotent et dissertent trop, et Maxime semble avoir trop rabon, lors- qu'il soutient, contrairement à Cinna, qu'on n'a jamais à rougir d'avoir recouvré M li^erté, dût-on la recevoir des mains d'Auguste.
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