ACTE I, SCÈNE VI 18?
Enfin iu sais l'afifront et tu liens la vengeance :
Je ne te dis plus rien. Venge-moi, venge-toi,
Montre-toi digne fils d'un père tel que moi.
Accablé des malheurs où le destin me range,
Je vais les déplorer : va, cours, vole, et nous venge. 290
��SCÈNE VI. D. RODRIGUE. Percé jusques au fond du cœur
opposer à offeraé, cette hardiesse n'est pas condamnable. » (Académie.) Dan» le Dictionnaire de l'Académie, édition de 1694, le mot est, en effet, admis. En tout cas, c'est une erreur de croire, avec le P. Bouhours et M. Aimé Martin, qu'o/"- fenseur soit de l'invention de Corneille : MM. Marty-Laveaux, Littré, Godefroy, citent des exemples de ce mot empruntés à Garnier et à d'Urfé. Racine a dit, par une visible réminiscence de ce beau vers :
Plus l'offenseur m'est cher, plus je ressens l'injure. {Thébaide I, K.)
286. Tu tiens la vengeance, dans la pensée de Corneille, doit signifier, non pas : tu as fa vengeance toute prête, mais plutôt : tu tiens l'instrument de ta ven- geance (l'épée que son père a fait passer en ses mains, comme il l'annonce au vers 260). Ce n'est, d'ailleurs, que la traduction libre de l'espagnol : « Voilà l'of- fense, voici l'épée. »
288. Var. Montre-toi digne flU d'un tel père que moi. (1637-56.)
Un père tel que moi; le comte dira plus loin (II, 1 ) : « Un hoiiime tel que moi! » C'est le même orgueil au fond, mais très différent dans l'eipression, ■impie et fier chez don Diègue, arrogant chez don Germas.
289. Où, auxquels, comme aux vers 791 et 1602. On disait ranger à pour asiu- ettir, réduire à :
L'amonr! Ah! ce mot seul me range d la douceur. {Galerie, 1SI2.) Range d ce que ta dois ton âme en patience. {Imitation, II, 1627.)
290. Var. Je m'en vais les pleurer : va, cours, vole et nons venge. (1637-66.)
291. Ces monologues lyriques, substitués aux chœurs de la tragédie antique, ne datent point de Corneille. Pour n'en citer qu'un exemple, dans la Bradamante de Garnier, si curieusement analysée dans la thèse récente de M. Faguet, Roger discute avec lui-même sur les moyens de garder son serment sans perdre ce qu'il aime, et par la délicatesse un peu subtile de l'analyse morale, ce monologue n'est pas sans analogie avec celui de Rodrigue. Corneille distinguait entre les monologues et les stances : « Les monologues, écrivait-il, sont trop longs et trop fréquents en cette pièce; c'était une beauté en ce temps-là: les comédiens les souhaitaient et croyaient y paraître avec plus d'avantage. La mode a si bien change que la plupart de mes derniers ouvrages n'en ont aucun, et vous n'en trouverez point dans Pompée, la Suite du Menteur, Théodore et Pertharite, ni dans fféraclius, Andromède, Œdipe et la Toison d'or, à la réserve des stances. » [Examen de Clitandre.) Dans l'examen d'Andro/nèrfe il remarque que les stances, par leurs cadences imprévues, introduisent quelque variété dans le drame; mais, «joute-t-il « il y faut éviter le trop d'afiectation. C'est par là que les stances du Cid sont inexcusables, et les mots de peine et Chimène, qui font la dernière rime de cluque strophe, marquent un je" du coté du poète, qui n'a rien de naturel
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