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d’en être quitte pour avoir donné sa fille à un homme qui avait tant de crédit. »

Tout est invraisemblable dans cette anecdote ingénieuse : et la mélancolie de Corneille, qui n’avait point si aisément » la tête renversée » (Mlles Courant et Milel en pouvaient témoigner), et la sollicitude de Richelieu, transformé en agent matrimonial, et la surprise du pèr^ M. de Lampérière, qui devait savoir à quoi s’en tenir sur les rapports de Richelieu et de Corneille. Les acclamations qui avaient salué le Cid avaient retenti, noug le savons, jusqu’au fond de la province; on y pouvait ignorer tous les incidents de la querelle qui avait suivi, mais on y savait que l’auteur du Cid, d’Horace et de Cinna, le fils du maître des eaux et forêts de Rouen, tout récemment anobli, n’était pas un parti vulgaire, même pour la fille du lieutenant-général des Andelys. Où l’aurait-on su mieux qu’en Normandie? Où pouvait-on connaître mieux qu’aux Andelys une famille si bien connue à Rouen? Tout au plus admettrait-on que Richelieu ait aplani certaines difficultés, si elles se sont présentées; il devait bien à Corneille cette compensation 2. D’ailleurs, le récit de Fontenelle pèche par la base : car il est faux que Corneille se soit marié » fort jeune », et l’on fixe généralement à l’année de Cinna (1640) l’année de son mariage. Du moins dans une pièce qui date de cette époque, Pétri Cornelii Epicedium, le savant Ménage vante Cinna dont le succès était encore tout nouveau :

Donec Apollineo gaudebit scena cothurno.
Ignés dicent,ur, pulohra Chimena, tui
Nec tu, crudelis Medaea, taceberis unquam.
Non Graià mferior, non minor Ausonia.
Vos quoque, tergemini, mavorlia pectora, fralres,
Et te, Cinna fero.t, fama loquetur aaus.

Être célébré en vers latins, cela dut être une douce satistion pour Corneille, élève des Jésuites, et à qui la muse latine était familière. Mais d’où ce soudain enthousiasme de Ménage ? Le docte précepteur de Mme de la Fayette et de Mme de Sévigné

1. Fontenelle, Vie de Corneille.

2. M. Levallois ne croit pas plus que nous à cette lécende et observe que Corneille ne nous a pas laissé un seul ténioignage de sa reconnaissance envers Richelieu.