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INTRODUCTION ZS

excuse cette faiblesse chez Richelieu, vainqueur de la maison d'Autriche; on la comprend moins chez un roi qui perdait avec sérénité l'Artois, le Roussillon, la Catalogne, le Portugal A cette « commission » de poètes présidait, il est vrai, Calderon.

Mais Diamante était fort loin d'être un Calderon, bien qu'il ail écrit, lui aussi, quelques Aw?os. A ces pièces religieuses se mêlent, dans son Théâtre ', des pièces modernes, dont le sujet est emprunté à l'histoire de l'Espagne, comme la Judia de Toledo, histoire dramatique de cette juive qui sut arracher au roi Alphonse VIII le retrait du décret d'expulsion lancé contre les Israélites, et fut immolée par le peuple furieux. Mais c'est la légende du Cid qui tenta surtout Diamante : dans El Cerco de Zamora, il célébra les exploits du Cid déjà muret aguerri; mais le premier exploit du jeune Rodrigue, chanté par Castr(? et Corneille, il voulut le chanter à son tour dans El honradoy de su padre, le fils qui honore son père en le vengeant ^.

Longtemps ignorée, cette pièce eût sans doute continué de l'être, si Voltaire ne l'eût découverte juste au moment où il venait de publier son Commentaire sur Corneille (1764), des- tiné à doter la petite nièce de l'auteur du Cid, un peu, il est vrai, aux dépens du grand-oncle. Ce fut pour lui comme une révélation; aussitôt, au lieu de soumettre un doute au public, il prononce avec autorité le jugement définitif: « Nous avions toujours cru que le Cid de Guilhem de Castro était la seule tragédie que les Espagnols eussent donnée sur ce sujet inté- ressant; cependant il y avait encore un autre Cid, qui avait été représenté sur le théâtre de Madrid avec autant de succès que celui de Guilhem ^. » El il ne craignait pas d'affirmer que cet autre Cid était antérieur de quelques années à celui de Castro.

Cette insinuation, ou plutôt cette affirmation peu bienveil- lante devint dès lors article de foi, et passa dans les ouvrages les plus sérieux, dans le Siècle de Louis XIV, dans la nouvelle édition du Commentaire sur Corneille (1774) *. Et pourtant,

1. Son Théâtre a été publié à Madrid en 2 vol., 1670-74. Il est pea conna, L» oiographie Michaud ne mentionne même pas Diamante.

2. F'ubliée d'abord à Madrid, en 1658, dans un recueil dramatique, cette pièce se tirtu\e au tome V du Tesoro del teatro espaîiol, Paris, Baudry, 1839 e' 1848. [)ans ses Documents relatifs à l'histoire du Cid, M. Hippolyte Lucas & traduit la pièce de Diamante.

3. Gazette littéraire, 12 août 1764, article intitulé : Anecdotes sur le Cid.

4. Au début de celle nouvelle édition, il écrit : « L'Espaarne avait deux tragé- dies du Cid, l'une de Diamante, qui était la plus ancienne; l'autre, de Gnilain de Castro, qui était la plus en vogue. On voyait dans toutes les deux une infante amoureuse du Cid, et un bouffon appelé 1« valet gracieux, personnages également

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