Vous êtes assez fort pour vous vaincre vous-même.
Elle a craint comme moi ces premiers mouvemens
Qu’une perte imprévue arrache aux vrais amans,
Et dont la violence excite assez de trouble,
Sans que l’objet présent l’irrite et le redouble.
Fabian, je la vois.
Seigneur, souvenez-vous…
Hélas ! elle aime un autre, un autre est son époux !
Scène II
Oui, je l’aime, Seigneur, et n’en fais point d’excuse ;
Que tout autre que moi vous flatte et vous abuse,
Pauline a l’âme noble, et parle à cœur ouvert.
Le bruit de votre mort n’est point ce qui vous perd ;
Si le ciel en mon choix eût mis mon hyménée,
À vos seules vertus je me serais donnée,
Et toute la rigueur de votre premier sort
Contre votre mérite eût fait un vain effort ;
Je découvrais en vous d’assez illustres marques
Pour vous préférer même aux plus heureux monarques :
Mais puisque mon devoir m’imposoit d’autres lois,
De quelque amant pour moi que mon père eût fait choix,
Quand, à ce grand pouvoir que la valeur vous donne
Vous auriez ajouté l’éclat d’une couronne,
Quand je vous aurais vu, quand je l’aurois haï,
J’en aurois soupiré, mais j’aurois obéi,
Et sur mes passions ma raison souveraine
Eût blâmé mes soupirs et dissipé ma haine.
Que vous êtes heureuse ! et qu’un peu de soupirs
Fait un aisé remède à tous vos déplaisirs !
Ainsi, de vos désirs toujours reine absolue,