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Parlez à mon esprit de mon triste devoir,
Attaquez sans rien craindre une main triomphante.

Elvire

Modérez ces transports, voici venir l’infante.



Scène II

L’Infante, Chimène, Léonor, Elvire
L’Infante

Je ne viens pas ici consoler tes douleurs ;
Je viens plutôt mêler mes soupirs à tes pleurs.

Chimène

Prenez bien plutôt part à la commune joie,
Et goûtez le bonheur que le ciel vous envoie,
Madame : autre que moi n’a droit de soupirer.
Le péril dont Rodrigue a su nous retirer,
Et le salut public que vous rendent ses armes,
À moi seule aujourd’hui souffrent encor les larmes :
Il a sauvé la ville, il a servi son roi ;
Et son bras valeureux n’est funeste qu’à moi.

L’Infante

Ma Chimène, il est vrai qu’il a fait des merveilles.

Chimène

Déjà ce bruit fâcheux a frappé mes oreilles ;
Et je l’entends partout publier hautement
Aussi brave guerrier que malheureux amant.

L’Infante

Qu’a de fâcheux pour toi ce discours populaire ?
Ce jeune Mars qu’il loue a su jadis te plaire :