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Ce bonheur a suivi leur courage invaincu,
Qu’ils ont vu Rome libre autant qu’ils ont vécu,
Et ne l’auront point vue obéir qu’à son prince,
Ni d’un état voisin devenir la province.
Pleurez l’autre, pleurez l’irréparable affront
Que sa fuite honteuse imprime à notre front ;
Pleurez le déshonneur de toute notre race,
Et l’opprobre éternel qu’il laisse au nom d’Horace.


JULIE.

Que vouliez-vous qu’il fît contre trois ?

Le vieil HORACE.

Qu’il mourût,
Ou qu’un beau désespoir alors le secourût.
N’eût-il que d’un moment reculé sa défaite,
Rome eût été du moins un peu plus tard sujette ;
Il eût avec honneur laissé mes cheveux gris,
Et c’était de sa vie un assez digne prix.
Il est de tout son sang comptable à sa patrie ;
Chaque goutte épargnée a sa gloire flétrie ;
Chaque instant de sa vie, après ce lâche tour,
Met d’autant plus ma honte avec la sienne au jour.