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paroisse au dedans luisant, net & beau. Quelques-uns tirent le mot d' Acacia du Grec άκάζειν. Estre aigu en forme de pointe, ou de άκή pointe d'une chose aiguë, à cause que l'Acacia qui croist en Égypte est fort épineux.

ACADEMIE. s. f. Lieu où s'assemblent des gens de lettres ou d'autres personnes qui font profession de quelqu'un des Arts Liberaux, comme la Peinture, la Sculpture, &c. On donna ce nom d'Académie à une Maison où Platon enseignoit la Philosophie dans un des Fauxbourgs d'Athenes, à cause qu'elle estoit l'heritage d'un Athenien appellé Academus, qui vivoit du temps de Thesée. Plutarque le nomme Echedemus, & dit que l'Ecole de Platon fut nommée Echedemie, & que Cimon l'embellit par des fontaines qu'il y fit venir, & par des boccages & des allées d'arbres qu'on y dressa pour la commodité des Philosophes, qui furent nommez Académiciens. Speusippus, neveu de Platon, enseigna sa doctrine aprés sa mort dans la mesme Ecole, & Xenocrate, Polemon, Cratés & Crantor ses successeurs, n'y changerent rien, mais Arcesilas qui les suivit y reforma quelque chose, & fonda par sa reforme ce qu'on appella La seconde Académie. Son Disciple Lacidés en fut le chef, & Carneades qui vint aprés luy, prit une partie de ses sentimens. Depuis Platon, tous les lieux où se sont assemblez des gens de Lettres ont esté nommez Académies, & ce fut ainsi que l'on nomma une Maison de Campagne qu'avoit Ciceron prés de Puteole. Il y écrivit les Questions qu'il appelle Académiques. Le Fauxbourg d'Athenes où étoit la celebre Ecole de Platon, fut appellé indifferemment le Ceramique, & le Fauxbourg de l'Académie. Comme dans ce siecle chaque Estat travaille à faire refleurir les beaux Arts & les Sciences, il s'est étably quantité d'Académies en Europe, & sur tout en Italie, où il y en a dans un grand nombre de Villes sous differens noms.

ACAJOU. s. m. Arbre de l'Amerique qui croist jusqu'à une telle grandeur, qu'on tire communement de son tronc des canots ou petites barques toutes d'une piece, larges de cinq à six pieds, & longues de plus de quarante. Son bois est rouge, sans aubier, leger, plus tendre que le sapin, & ne coule pas au fond de l'eau, comme la pluspart des bois de ce pays-là. Il ne laisse pas de durer aussi long-temps ; le ver ne s'y attache jamais, & comme il ne se pourrit pas aisément dans l'eau, on en fait de l'essente dont on couvre les maisons. Son écorce ressemble à celle du Chesne, & quand on l'incise en temps sec, il en sort de la gomme semblable à la gomme Arabique. Il porte de grands bouquets de fleurs ligneuses au milieu desquelles est une espece de gland canelé, dont les Perroquets font leur nourriture. Quand ils ont mangé de cette graine, leur chair a le goust de l'ail. Ses feüilles sont faites comme celles du Fresne. Cet arbre s'appelle Acajou rouge. Il y en a un autre qu'on appelle Acajou blanc, à cause que son bois est blanc. Il est fort tendre quand on le coupe, mais dés qu'il est sec, il devient si dur que le marteau a peine à y faire entrer un clou. Il est sujet au ver, & dure moins que l'Acajou rouge. Il ne croist que dans des lieux humides, & il y en a de plus gros que le corps d'un homme. Ces arbres ne portent point de fruit.

Il y a aussi un Acajou qui en porte. Ce fruit qui est jaune & rouge par les endroits où le soleil a donné, est fait en façon de petite poire, & a la grosseur d'un oeuf. Tout le dedans n'est qu'une filasse spongieuse, & remplie d'un suc si acre & si astringent qu'il prend à la gorge quand il est vert,


mais lorsqu'il a atteint sa maturité, il est tres-délicieux. Il n'y a aucune graine dedans ; mais au bout du fruit on voit une maniere de noix, faite comme un roignon de liévre, & de la mesme grosseur. Sa couleur est de gris cendré, & elle est couverte d'une double écorce, dont l'entre-deux est une matiere poreuse, pleine d'une huile caustique. On s'en sert pour guerir les dartres, & elle est encore bonne à faire tomber les corps des pieds. Le noyau de cette noix est gros come une amande, & fortifie l'estomac lorsqu'il est mangé à jeun. Le vin qu'on fait de ce fruit est délicieux, & soulage les maux de rate. Il est blanc comme du lait estant fait nouvellement, & lorsqu'il a boüilly de soy-mesme quelque-temps dans le vaisseau, il devient tres-agreable. Le suc qui sort de ce fruit quand il est vert, a cela de particulier, que les taches qu'il fait sur le linge, ne peuvent s'oster que quand l'arbre pousse de nouvelles fleurs. Alors ces taches se dissipent d'elles-mesmes. Cette sorte d'Acajou n'est qu'un petit arbre dont les branches panchent un peu vers la terre. Elles ont de grandes feüilles qui approchent de celles du Noyer, mais qui sont plus larges, plus rondes, plus fortes & plus luisantes, & rendent une odeur plus agreable. Celle de ses fleurs est ravissante quand elles s'ouvrent le matin. Elles sont petites, d'une couleur purpurine & ramassées en bouquets.

ACANTHE. s. f. Plante que l'on appelle autrement Branche Ursine, ou Branque Ursine, & dont la tige qui est lissée & de la grosseur d'un doigt, a deux coudées de hauteur. Ses feüilles qui sont grasses, lissées & noirastres, sont plus larges & plus longues que les feüilles des Laituës. Elles en a par intervalles auprés de sa cime de petites qui sont en façon de coquille, longuettes & piquantes. Sa teste est comme une houppe ou un bouquet. Il y a de deux sortes d'Acanthe, la Domestique qui est cultivée & sans épines, & la Sauvage, qui est épineuse. Sa qualité qui est chaude & seche, la fait mettre au rang des herbes émollientes. On ne se sert que de ses feüilles dans la Medecine, & l'usage en est plus externe qu'interne. Le mot d'Acanthe est venu du Grec ακή, pointe, épine.

Acanthe est aussi un terme d'Architecture, & l'on nomme ainsi un ornement qui a la figure de l'Acanthe qu'on met dans le chapiteau de la colonne Corinthienne. Ainsi on dit qu' Un chapiteau est taillé à feüilles d'Acanthe, pour dire, qu'On y a representé les feüilles de cette plante. Cela est venu de ce qu'un Architecte en ayant vû une autour d'un panier ou d'une corbeille, s'avisa d'en faire l'ornement d'un chapiteau. On tient que les Sculpteurs Grecs se sont servis de l'Acanthe domestique pour faire les ornemens de leurs Ouvrages, & que les Sculpteurs Gothiques ont imité l'Acanthe sauvage dans les Chapiteaux de leurs colonnes.

ACAPATLI. s. m. Plante de la nouvelle Espagne qui porte le poivre long. Elle a son tronc contourné à la façon des sarments, & ce tronc a des feüilles qui ressemblent à celles du poivre blanc, mais plus longues & aiguës. Elles sont odorantes, d'un goust piquant & acre, chaudes & seches au troisiéme degré. Son fruit est rond & long, & sa graine ne meurit jamais assez sur la plante, ny ne vient à la perfection qu'il faudroit pour estre propre à estre semée. Cela est cause qu'on la cuëille si-tost qu'on voit qu'elle commence à rougir. On la met au Soleil, où elle meurit, & on la garde de cette maniere. On la mange seche & verte, & elle donne un bon goust aux viandes, pourveu qu'on ne les approche pas du feu aprés qu'on l'y a mes-