notre souverain.
S’il en dédit un père,
Peut-être ai-je une sœur qu’il n’en dédira pas.
Ce grand prince pour elle a tant de complaisance,
Qu’à sa moindre prière il ne refuse rien ;
Et si son cœur voulait s’entendre avec le mien…
Reposez-vous, Seigneur, sur mon obéissance,
Et contentez-vous de savoir
Qu’aussi bien que ma sœur j’écoute mon devoir.
Allez trouver Cotys, et sans aucun scrupule…
Perdriez-vous pour moi son trône sans ennui ?
Le voilà qui paraît. Quelque ardeur qui vous brûle,
Mettez d’accord mon père, Agésilas et lui.
Scène IV
Vous voyez de quel air Elpinice me traite,
Comme elle disparaît, Seigneur, à mon abord.
Si votre âme, Seigneur, en est mal satisfaite,
Mon sort est bien à plaindre autant que votre sort.
Ah ! S’il n’était honteux de manquer de promesse !
Si la foi sans rougir pouvait se dégager !
Qu’une autre de mon cœur serait bientôt maîtresse !
Que je serais ravi, comme vous, de changer !
Elpinice pour moi montre une telle glace,
Que je me tiendrais sûr de son consentement.
Aglatide verrait qu’une autre prît sa place
Sans en murmurer un moment.
Que nous sert qu’en secret l’une et l’autre engagée
Peut-être ainsi que nous porte son cœur ailleurs ?
Pour voir notre infortune entre elles partagée,
Nos destins n’en sont pas meilleurs.
Elles aiment ailleurs, ces belles dédaigneuses ;
Et peut-être, en dépit du sort,
Il serait un moyen et de les rendre heureuses,
Et de nous rendre heureux par un commun accord.
Souffrez donc qu’avec vous tout mon cœur se déploie.
Ah ! Si vous le vouliez, que mon sort serait doux !
Vous seul me pouvez mettre au comble de ma joie.
Et ma félicité dépend toute de vous.
Vous me pouvez donner l’objet qui me possède.
Vous me pouvez donner celui de tous mes vœux :
Elpinice me charme.
Et si je vous la cède ?
Je céderai de même Aglatide à vos feux.
Aglatide, Seigneur ! Ce n’est pas là m’entendre,
Et vous ne feriez rien pour moi.
Ne vous devez-vous pas à Lysander pour gendre ?
Oui ; mais l’amour ici me fait une autre loi.
L’amour ! Il n’en faut point écouter qui le blesse,
Et qui nous ôte son appui.
L’échange des deux sœurs n’a rien qui l’intéresse,
Nous n’en serons pas moins à lui ;
Mais de porter ailleurs sa main, qui leur est due,
Seigneur, au dernier point ce sera l’irriter,
Et sa protection perdue,
N’avons-nous rien à redouter ?
Si je n’en juge mal, sa faveur n’est pas grande,
Seigneur, auprès d’Agésilas ;
Il n’obtient presque rien de quoi qu’il lui demande.
Je vois qu’assez souvent il ne l’écoute pas ;
Mais pour un différend frivole,
Dont nous ignorons le secret,
Ce prince avouerait-il un amour indiscret,
D’un tel manquement de parole ?
Lui qui lui doit son trône, et cet illustre rang
D’unique général des troupes de la Grèce,
Pourrait-il le haïr avec tant de bassesse,
Qu’il pût autoriser ce mépris de son sang ?
Si nous manquons de foi, qu’aura-t-il lieu de croire ?
En aurions-nous pour lui plus que pour Lysander ?
Pensez-y bien, Seigneur, avant qu’y hasarder
Nos sûretés et votre gloire.
Et si ce différend, que vous craignez si peu,
Lui fait pour notre hymen refuser un aveu ?