Cette page n’a pas encore été corrigée
- Et que l’heureux berceau de ta beauté suprême
- Enfante l’horreur même ?
- Venge l’honneur de ta naissance
- Qu’on a souillé par un tel attentat ;
- Rends-lui sa première innocence,
- Et tu rendras le calme à tout l’État :
- Et nous dirons enfin que d’où le mal procède
- Part aussi le remède.
CASSIOPE
- Peuple, elle veut parler ; silence à la déesse ;
- Silence, et préparez vos cœurs à l’allégresse.
- Elle a reçu nos vœux, et les daigne exaucer ;
- Écoutez-en l’effet qu’elle va prononcer.
VÉNUS
, au milieu de l’air.
- Ne tremblez plus, mortels ; ne tremble plus, ô mère !
- On va jeter le sort pour la dernière fois.
- Et le ciel ne veut plus qu’un choix
- Pour apaiser de tout point sa colère.
- Andromède ce soir aura l’illustre époux
- Qui seul est digne d’elle, et dont seule elle est digne.
- Préparez son hymen, où, pour faveur insigne.
- Les dieux ont résolu de se joindre avec vous.
PHINÉE
- Souffrez que sans tarder je porte à ma princesse[1],
- Seigneur, l’heureux arrêt qu’a donné la déesse.
CÉPHÉE
- Allez, l’impatience est trop juste aux amants.
CASSIOPE
- Suivons-la dans le ciel par nos remercîments ;
- Et, d’une voix commune adorant sa puissance,
- Montrons à ses faveurs notre reconnaissance.
CHŒUR
- Ainsi toujours sur tes autels
- Tous les mortels
- Offrent leurs cœurs en sacrifice !
- Ainsi le Zéphyr en tout temps
- Ainsi toujours sur tes autels
- Sur tes palais de Cythère et d’Éryce
- Fasse régner les grâces du printemps !
- Daigne affermir l’heureuse paix
- Qu’à nos souhaits
- Vient de promettre ton oracle ;
- Et fais pour ces jeunes amants,
- Daigne affermir l’heureuse paix
- Pour qui tu viens de faire ce miracle.
- Un siècle entier de doux ravissements.
- Dans nos campagnes et nos bois
- Toutes nos voix
- Béniront tes douces atteintes ;
- Et dans les rochers d’alentour
- Dans nos campagnes et nos bois
- La même écho[2] qui redisait nos plaintes
- Ne redira que des soupirs d’amour.
CÉPHÉE
- C’est assez… la déesse est déjà disparue ;
- Ses dernières clartés se perdent dans la nue ;
- Allons jeter le sort pour la dernière fois.
- Malheureux le dernier que foudroîra son choix.
- Et dont en ce grand jour la perte domestique
- Souillera de ses pleurs l’allégresse publique !
- Madame, cependant, songez à préparer
- Cet hymen que les dieux veulent tant honorer :
- Rendez-en l’appareil digne de ma puissance,
- Et digne, s’il se peut, d’une telle présence.
CASSIOPE
- J’obéis avec joie, et c’est me commander
- Ce qu’avec passion j’allais vous demander,
Scène IV
Cassiope, Persée, suite de la reine.
CASSIOPE
- Eh bien ! vous le voyez, ce n’était pas un crime,
- Et les dieux ont trouvé cet hymen légitime,
- Puisque leur ordre exprès nous le fait achever,
- Et que par leur présence ils doivent l’approuver.
- Mais quoi ! vous soupirez ?
PERSÉE
- J’en ai bien lieu, madame.
CASSIOPE
Le sujet ?
PERSÉE
- Votre joie.
CASSIOPE
- Elle vous gêne l’âme ?
PERSÉE
- Après ce que j’ai dit, douter d’un si beau feu,
- Reine, c’est ou m’entendre ou me croire bien peu.
- Mais ne me forcez pas du moins à vous le dire,
- Quand mon âme en frémit et mon cœur en soupire.
- Pouvais-je avoir des yeux et ne pas l’adorer ?
- Et pourrais-je la perdre et n’en pas soupirer ?
CASSIOPE
- Quel espoir formiez-vous, puisqu’elle était promise,
- Et qu’en vain son bonheur domptait votre franchise ?
PERSÉE
- Vouloir que la raison règne sur un amant,
- C’est être plus que lui dedans l’aveuglement.
- Un cœur digne d’aimer court à l’objet aimable
- Sans penser au succès dont sa flamme est capable ;
- Il s’abandonne entier, et n’examine rien ;