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ORMÈNE.

Hélas !Songez à vous, la suite vous menace ;
Et je pense avoir même entendu quelque voix
1720Nous crier qu’on apprît à dédaigner les rois.

PALMIS.

Prince ingrat ! lâche roi ! Que fais-tu du tonnerre,
Ciel, si tu daignes voir ce qu’on fait sur la terre ?
Et pour qui gardes-tu tes carreaux embrasés,
Si de pareils tyrans n’en sont point écrasés ?
1725Et vous, Madame, et vous dont l’amour inutile,
Dont l’intrépide orgueil paroît encor tranquille,
Vous qui brûlant pour lui, sans vous déterminer,
Ne l’avez tant aimé que pour l’assassiner,
Allez d’un tel amour, allez voir tout l’ouvrage,
1730En recueillir le fruit, en goûter l’avantage.
Quoi ? vous causez sa perte, et n’avez point de pleurs !

EURYDICE.

Non, je ne pleure point, Madame, mais je meurs.
Ormène, soutiens-moi.

ORMÈNE.

Ormène, soutiens-moi.Que dites-vous, Madame ?

EURYDICE.

Généreux Suréna, reçois toute mon âme.

ORMÈNE.

1735Emportons-la d’ici pour la mieux secourir.

PALMIS.

Suspendez ces douleurs[1] qui pressent de mourir,
Grands Dieux ! et dans les maux où vous m’avez plongée,
Ne souffrez point ma mort que je ne sois vengée !


FIN DU CINQUIÈME ET DERNIER ACTE.
  1. L’édition de 1692 a changé ces douleurs en les douleurs.