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330Ne pouvant s’élever jusqu’à votre personne,
Soit réduite à descendre à ces malheureux rois
À qui, quand vous voudrez, vous donnerez des lois.
Et n’appréhendez point d’en regretter la perte :
Il n’est cour sous les cieux qui ne vous soit ouverte ;
335Et partout votre gloire a fait de tels éclats,
Que les filles de roi ne vous manqueront pas.

SURÉNA.

Quand elles me rendroient maître de tout un monde,
Absolu sur la terre et souverain sur l’onde,
Mon cœur…

EURYDICE.

Mon cœur…N’achevez point : l’air dont vous commencez
340Pourroit à mon chagrin ne plaire pas assez ;
Et d’un cœur qui veut être encor sous ma puissance
Je ne veux recevoir que de l’obéissance.

SURÉNA.

À qui me donnez-vous ?

EURYDICE.

À qui me donnez-vous ?Moi ? que ne puis-je, hélas !
Vous ôter à Mandane, et ne vous donner pas !
345Et contre les soupçons de ce cœur qui vous aime
Que ne m’est-il permis de m’assurer moi-même !
Mais adieu : je m’égare.

SURÉNA.

Mais adieu : je m’égare.Où dois-je recourir,
Ô ciel ! s’il faut toujours aimer, souffrir, mourir[1] ?


FIN DU PREMIER ACTE.
  1. Voyez ci-dessus, p. 474, vers 268.