Vous vous devez des fils, et des Césars à Rome,
Qui fassent à jamais revivre un si grand homme.
Pour revivre en des fils nous n’en mourons pas moins,
Et vous mettez ma gloire au-dessus de ces soins.
Du levant au couchant, du More[1] jusqu’au Scythe,
Les peuples vanteront et Bérénice et Tite ;
Et l’histoire à l’envi forcera l’avenir
D’en garder à jamais l’illustre souvenir[2].
Prince, après mon trépas soyez sûr de l’empire ;
Prenez-y part en frère, attendant que j’expire.
Allons voir Domitie, et la fléchir pour vous.
Le premier rang dans Rome est pour elle assez doux ;
Et je vais lui jurer qu’à moins que je périsse,
Elle seule y tiendra celui d’impératrice.
Est-ce là vous l’ôter ?
Ah ! c’en est trop, Seigneur.
Daignez contribuer à faire son bonheur,
Madame, et nous aider à mettre de cette âme
Toute l’ambition d’accord avec sa flamme.
Allons, Seigneur : ma gloire en croîtra de moitié,
Si je puis remporter chez moi son amitié.
- ↑ Le mot est écrit ainsi dans toutes les anciennes éditions, y compris celles de Thomas Corneille (1692) et de Voltaire (1764). Voyez tome III, p. 136, note 2.
- ↑ C’est Bérénice qui exprime cette idée chez Racine, dans les derniers vers de la tragédie. Elle s’adresse à Titus et à Antiochus.
Adieu : servons tous trois d’exemple à l’univers
De l’amour la plus tendre et la plus malheureuse
Dont il puisse garder l’histoire douloureuse.